Cinéma de mon enfance…

Oui, c’est le cinéma de mon enfance, celui qui passait à la télévision, celle des années 60 en noir et blanc. Des films encore jamais vus au cinéma mais si souvent devant cet écran magique…Combien de fois Errol Flynn nous transportait dans un monde imaginaire et merveilleux ! Si je nous sommes devenus des cinéphiles acharnés dans les années 70 à vouloir tout voir, tout comprendre et toujours dans des cinémas très loin des standards d’aujourd’hui c’est un peu, voir beaucoup grâce à eux acteurs et témoins de la période la plus incroyable d’Hollywood !

 

 

Michael Curtiz (de son vrai nom Mihaly Kertész) naquit en Hongrie en 1888.

De 1912 à 1919, il contribua grandement à l’essor de l’industrie cinématographique hongroise, avant de devoir s’exiler en Autriche, pour des motifs politiques. En 1926, Jack Warner, qui avait vu son film Die Sklavenkônigin (L’Esclave-reine, 1924) l’invite à Hollywood. L’immigrant s’acclimatera rapidement, mais il gardera toute sa vie l’habitude d’émailler ses phrases de savoureux néologismes, restés légendaires. Signant une quarantaine de réalisations en moins de dix ans, Curtiz s’essaye avec succès aux genres les plus divers…Curtiz se réjouissait à la vue du sang, à tel point qu’il insistait pour que les épées ne soient pas mouchetées ! Ce jugement d’Errol Flynn est peut-être influencé par l’antipathie réciproque des deux hommes. Toutefois, Olivia de Havilland confirme pour sa part que le cinéaste se montra toujours « despotique et coléreux » d’un tempérament maniaco-dépressif, Curtiz sacrifiait peu en effet aux « contacts humains » mais son dynamisme, sa rapidité, son efficacité et son sens de l’économie allaient faire de lui le meilleur artisan de la Warner, pour laquelle il signera 45 films de 1930 à 1939.

 

 

 

 

 

 

 

En 1935, il va pour la première fois disposer de moyens financiers importants pour Captain Blood, dont le rôle principal est proposé à Robert Donat. Curtiz, qui a tourné en Hongrie de nombreux films historico-romantiques, apparaît donc tout désigné pour porter à l’écran le célèbre roman de Rafael Sabatini, qui retrace la vie aventureuse de Peter Blood, médecin et pirate malgré lui au temps de Jacques II. La Warner jugeait en effet le moment opportun pour offrir à nouveau au public les « pirateries » acrobatiques qui avaient connu leur âge d’or avec le grand Douglas Fairbanks. Mais Robert Donat refuse le rôle et Curtiz se souvient alors d’un jeune acteur qu’il a dirigé dans un film de série B, The Case of the Curious Bride, Errol Flynn, alors en pleine lune de miel, est convoqué. La fougue et la conviction de son interprétation, son jeu alerte et plein d’humour feront oublier son inexpérience d’acteur. D’autant qu’il est fort bien entouré par Olivia de Havilland et Basil Rathbone. Curtiz saura de plus réunir d’excellents techniciens et obtenir de remarquables effets spéciaux, ainsi qu’une musique qui fera date (le compositeur Erich Korngold fait là de brillants débuts).

 

 

 

 

Les films de cape et d’épée, dont la réussite reposait essentiellement sur l’abattage de la vedette masculine, n’avaient pas de prétentions intellectuelles. Par leur fraîcheur et leur rythme alerte, ils suscitèrent néanmoins l’enthousiasme de toutes les catégories de public y compris des critiques. La recette n’était pas nouvelle, elle avait déjà été concoctée au siècle précédent par Alexandre Dumas et ses nombreux émules. La Vieille Europe allait encore contribuer à l’essor du genre, par l’intermédiaire des metteurs en scène et des musiciens exilés outre-Atlantique, sans oublier les maîtres d’armes belges, qui réglèrent d’inoubliables duels. Côté acteurs, le succès du film de cape et d’épée des années 1930 est largement imputable à la colonie anglaise de Hollywood, dont faisaient alors partie Ronald Colman et Basil Rathbone, Errol Flynn lui-même, quoique Australien avait l’accent anglais. Héros sans reproche ou traîtres, tous surent camper des personnages d’une élégante désinvolture, capables de s’adapter avec humour et naturel aux situations les plus extravagantes.



 

 

 

 

 

 

 

 

Curtiz déclarait…Lorsque je lis un scénario je ne vois pas des mots écrits noir sur blanc, mais déjà de l’action ! Il appliquera cette devise à des westerns ou à des comédies où Errol Flynn tiendra la vedette mais avec des rapports de plus en plus difficiles leur film suivant, The Charge of the Light Brigade (La Charge de la brigade légère, 1936) fait une large part à l’intrigue sentimentale et le rythme de l’action est quelque peu ralenti par les très nombreux « cartons » intercalés entre les séquences. Mais la charge finale, magnifiquement enlevée, reste inoubliable.

 

 

 

 

 

 

 

 

Errol Flynn

Incarne Robin des bois en 1938, la couleur, dont l’emploi s’était répandu, constituait un nouvel atout pour le film d’aventures. Les teintes très pur et vivement contrastées du Technicolor confèrent aux Aventures de Robin des bois (The Adventures of Robin Hood) le charme naïf des anciennes images d’Épinal. Le film avait été commencé par William Keighley avec comme réalisateur en second B. Reaves Eason, célèbre pour avoir filmé la course de chars du Ben Hur de 1925. Après six à sept semaines de tournage, Keighley, qui avait tourné la plupart des scènes de la forêt de Sherwood, est renvoyé par le producteur Henry Blanke, qui juge son travail trop superficiel. Curtiz, appelé à la rescousse, tournera tous les intérieurs en studio et quelques séquences supplémentaires en extérieur. Le film est une réussite totale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En 1940, Curtiz dirige Flynn dans un dernier film de cape et d’épée. The Sea Hawk (L’Aigle des mers) retrace les aventures de nobles capitaines anglais qui se firent corsaires par dévouement à la reine Elisabeth (Flora Robson). La photographie superbe, l’invention constante et la conviction du récit emportent l’adhésion. Et l’exaltation de l’abnégation patriotique tombe à propos en cette période troublée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A l’entrée en guerre des Etats-Unis, Curtiz, maintenant réalisateur de prestige de la Warner, célèbre les valeurs nationales et l’effort militaire dans des comédies musicales mais surtout avec Casablanca (1942) il réalise un film romantique et nostalgique, Casablanca (trois Oscars en 1943) n’a rien perdu aujourd’hui de sa séduction et enchante toujours de nouvelles générations de spectateurs. Curtiz a su trouver en Humphrey Bogart un interprète idéal dans un rôle d’aventurier moderne, cynique et amer, mais néanmoins capable de se sacrifier pour la femme de sa vie (Ingrid Bergman). Certains des grands films de l’histoire du cinéma donnent l’impression qu’ils étaient destinés dès le début à être tels quels, qu’ils n’auraient pu être interprétés différemment ou mis en scène par quelqu’un d’autre. Et pourtant, parfois, un film n’aurait en rien dû être tel que nous le connaissons tous. Et c’est bien le cas de Casablanca…