Génius of Freedom !

Un clochard, un gentilhomme, un poète, un rêveur, un compagnon solitaire,

Toujours plein d’espoir de romance et d’aventures…

 

 

 

 

CHARLIE CHAPLIN 

         Charles Spencer Chaplin…Surnom Charlot ou The Tramp

 


Naissance 16 avril 1889
Londres (Royaume-Uni)
Nationalité Drapeau : Royaume-Uni Britannique
Décès 25 décembre 1977 (88 ans)
Corsier-sur-Vevey (Suisse)
Profession Acteur, réalisateur, compositeur, scénariste et producteur

 

 

 

LE PLUS GRAND ! Un parcours hors norme, une capacité à concrétiser ses désirs en réalité avec un mariage incroyable entre créativité et sens des affaire pour garder sa liberté. Il révolutionne la communication exprime ses sentiments, ses idées. Avec peu de moyens techniques, au prix d’un travail acharné, d’une créativité sans limite il invente le personnage incontournable du 20ème siècle  ” Charlot ” expression universelle de nos désirs, nos peurs, nos doutes avec lesquels nous vivons tous les jours. 82 films. Sur 20 ans cinq de ses films ont révolutionné le 7ème art.

 

 

 

 

 

Chaplin grandit dans la misère entre un père absent et une mère en grandes difficultés financières, tous deux artistes de music-hall, qui se séparent deux ans après sa naissance. Plus tard, sa mère est internée à l’hôpital psychiatrique alors que son fils avait quatorze ans. À l’âge de cinq ans, il fait sa première apparition sur scène. Il commence très tôt à se produire dans des music-halls et devient rapidement acteur. À 19 ans, il est remarqué par l’imprésario Fred Karno et réalise une tournée aux États-Unis. Il joue dans un film pour la première fois en 1914. Pour gagner sa vie il collabore avec les sociétés de production Essanay, Mutual et First National. En 1918, il est l’une des personnalités les plus connues au monde.

 

 

 

 

 

 

1919/ Chaplin cofonde la société United Artists avec contrôle total sur ses œuvres. Après les succès de Charlot soldat (1918), Le Kid (1921) L’Opinion publique (1923) La Ruée vers l’or (1925) Le Cirque (1928) refus de passer au sonore, réalise et produit ses 3 grands derniers films...Les Lumières de la ville (1931) Les Temps modernes (1936) Le Dictateur (1940). Sa popularité décline dans les années 40 suite à ses liaisons avec de très jeunes femmes et d’un procès en paternité. Accusé de sympathies communistes, le FBI et le Congrès lui font perdre son visa américain. Il s’établit en Suisse (1952) et abandonne son personnage de Charlot dans ses derniers films, Monsieur Verdoux (1947) Les Feux de la rampe (1952) Un roi à New York (1957) et La Comtesse de Hong-Kong (1967).

 

 

 

 

 

 

 

 

Chaplin écrit, réalise, produit, compose la musique et joue dans la plupart de ses films. Perfectionniste, son indépendance financière lui permet de consacrer des années au développement de ses œuvres. Bien qu’étant des comédies de type slapstick, ses films intègrent des éléments de pathos et sont marqués par les thèmes sociaux et politiques ainsi que par des éléments autobiographiques. En 1972, il reçoit un Oscar d’honneur pour sa contribution inestimable à l’industrie cinématographique et plusieurs de ses œuvres sont aujourd’hui considérées comme faisant partie des plus grands films de tous les temps.

 

 

 

 

 

 

 

Sa filmographie officielle est constituée de 80 films sortis depuis 1914. Dans sa biographie Chaplin, sa vie, son art paru en 1985, on ajoute son dernier film La Comtesse de Hong-Kong (1967) qui figure alors comme le 81e de la liste. En 2010, un 82e film est ajouté, il s’agit de La Course au voleur (A Thief Catcher) de la période Keystone considéré comme perdu.  Tout ses films sont muets malgré des bandes son rajoutées sur certains. Les Lumières de la ville (1931) et Les Temps modernes (1936) sont essentiellement muets, mais possèdent des bandes sonores constituées de musique, de bruitages et de séquences parlées pour le second. Les cinq derniers films de Chaplin sont des films parlants. Hormis La Comtesse de Hong-Kong, tous les films de Chaplin furent tournés au format 35 mm en noir et blanc.

 

 

 

 

 

1921 – The Kid


1923 – Woman of Paris


1925 – The Gold Rush


1928 – The Circus


1931 – City Lights


1936 – Modern Times


1940 – The Dictator


1947 – Monsieur Verdoux


1952 – Limelight


1957 – A King in NewYork


1967 – A Countess from Hong Kong

 

 

 

 

 

1914 – 1917. Ses débuts dans le cinéma…

 

 

Keystone.19 Films.

Après le théâtre Chaplin rejoint le studio Keystone, pour une nouvelle perspective de carrière. il signe un contrat d’un an avec un salaire hebdomadaire de 150 $ (7 000 $ de 2020) dans les studios de Los Angeles en décembre 1913. Mack Sennett, trouve le jeune homme de 24 ans trop jeune. Pour son second rôle, Chaplin choisit le costume de Charlot « Je voulais que tout soit une contradiction…Le pantalon ample, la veste étriquée, le chapeau étroit et les chaussures larges…J’ai ajouté une petite moustache qui, selon moi, me vieillirait sans affecter mon expression. Je n’avais aucune idée du personnage mais dès que je fus habillé, les vêtements et le maquillage me firent sentir qui il était. J’ai commencé à le connaître et quand je suis entré sur le plateau, il était entièrement né. »

 

 

 

 

7 février 1914 – « Charlot » apparaît pour la première fois dans Charlot est content et adopte le personnage définitivement. Sur le tournage de son 11e film Mabel au volant il affronte la réalisatrice. Il est autorisé à réaliser son premier film et promet de payer 1 500 $ (environ 70 000 $ de 2020) s’il ne marche pas. 4 mai 1914 – Un béguin de Charlot début comme réalisateur de Chaplin et le succès est là. Il réalise quasiment tous les courts-métrages de Keystone dans lesquels il joue. Chaplin dira par la suite que cette période où il réalisait un film par semaine fut la plus excitante de sa carrière. Il trouve son style. Lorsque le contrat de Chaplin expire à la fin de l’année, il demande un salaire hebdomadaire de 1 000 $ (environ 48 000$ de 2020) une somme que Sennett refuse.

 

 

Essanay.15 Films.

Chaplin rejoint la compagnie pour un salaire hebdomadaire de 1 250 $ (environ 58 000 $ de 2020) avec une prime d’embauche de 10 000 $. Chaplin consacre beaucoup de temps et d’énergie dans ses réalisations. Après Charlot fait la noce, et Charlot boxeur, il adopte un rythme d’un film par mois et modifie le personnage “Charlot”. De son caractère malveillant, rustre et grossier, il lui donne une personnalité plus douce et romantique constatée dans Le Vagabond et Charlot garçon de banque qui comportent un final plus triste. Une innovation pour les films comiques et les critiques sérieux commencent à plus apprécier son travail. Chez Essanay Chaplin trouve les thèmes qui définissent l’Univers de Charlot. Chaplin devient un phénomène culturel. Les magasins vendent des produits associés au personnage Charlot et apparaît dans des BD et des chansons. Sa popularité atteint l’étranger, il est la première star internationale du cinéma. 

 

 

Mutual.12 Films.

1916 – La Cie lui accorde un salaire annuel de 670 000 $, Chaplin, âgé de 26 ans, est l’une des personnes les mieux payées au monde “Nous pouvons payer ce gros salaire annuel car le public veut Chaplin et paiera pour le voir”. Chaplin dispose de son propre studio à Los Angeles. Recrute deux nouveaux acteurs pour l’accompagner, Albert Austin et Eric Campbell, et réalise une série de films plus élaborés et mélodramatiques…Charlot chef de rayon – Charlot pompier – Charlot musicien – Charlot rentre tard – Charlot et le Comte. Pour Charlot usurier il embauche l’acteur Henry Bergman qui travaillera avec lui pendant 30 ans. Charlot fait du ciné – Charlot patine dernières réalisations pour l’année 1916. Le contrat stipule qu’il doit réaliser un court-métrage toutes les quatre semaines. 1917 – Il réalise à sa demande juste 4 films  Charlot policeman – Charlot fait une cure – L’Émigrant – Charlot s’évade. Ces films sont considérés comme parmi les meilleurs de Chaplin qui indiqua que ses années à Mutual furent les plus heureuses de sa carrière.

 

 

 

 

 

La Pellicule.

Les premières en nitrate de cellulose, très inflammable car les projecteurs utilisent un arc électrique, avec une flamme nue.  40 minutes de film en cabine, en deux bobines, ou « galettes », de 20 minutes (soit 600 mètres). Avec la première galette projetée, on charge la deuxième sur un autre projecteur. A la fin de la première galette, on lance le second projecteur. Les supports de galette étaient fermés par des étouffoirs dont le but était d’empêcher la flamme, née au niveau du couloir de projection, de remonter vers les galettes. Ce support se décompose dès sa fabrication. Le nitrate de cellulose subit un phénomène de retrait. On utilise par la suite du triacétate de cellulose, dit « film de sécurité ». Ce support est peu inflammable, moins transparent, plus solide et vieillit mieux. Il devient donc possible d’assembler toutes les bobines en une seule, et de ne plus utiliser qu’un seul projecteur. Cependant, le « syndrome du vinaigre », en fait la dépolymérisation de cette pellicule lorsqu’elle vieillit, montre que ce support avait une durée de vie assez limitée.

 

 

 

 

 

 

1917 / Vie privée.

Chaplin se marie pour la première fois avec une actrice de 17 ans Mildred Harris, mais il n’est pas heureux de cette union, qui affecte sa créativité, et la réalisation d’Une idylle aux champs est difficile. Divorce en avril 1920, Chaplin écrit dans son autobiographie qu’ils n’étaient absolument pas faits l’un pour l’autre. Cet événement personnel influence Chaplin et imagine Charlot en tuteur d’un jeune garçon.

 

 

 

 

 

1923 – 1938 / UNITED ARTISTS. 8 Films.

 

Critiqué pour son absence de participation à la Première Guerre mondiale (24 ans en 1914) il se déclare prêt à se battre s’il était appelé et qu’il avait répondu à la conscription américaine. L’ambassade britannique aux États-Unis déclara qu’il était plus utile en gagnant de l’argent et en achetant des obligations de guerre que dans les tranchées. Chaplin est l’un des acteurs préférés des soldats, sa popularité continue de grandir dans le monde entier. Le nom de Charlie Chaplin fait partie de la langue véhiculaire de presque tous les pays et l’image de Charlot est universellement familière. En 1917, les imitateurs professionnels de Charlot sont si répandus qu’il lance des actions en justice. Neuf hommes sur dix qui participent à des soirées costumées reprennent son accoutrement. Les personnes cultivées commencent à considérer le jeune bouffon anglais, Charlie Chaplin comme un artiste extraordinaire et un génie comique.

 

 

 

 

 

1918 – 1922 / FIRST NATIONAL. 9 Films.

 

Son frère Sydney, devient son agent artistique…”Chaplin doit être autorisé à avoir tout le temps et l’argent nécessaire pour produire les films à sa manière… C’est la qualité, non la quantité, que nous voulons.” Chaplin signe un contrat d’un million de dollars (36 millions en 2020) pour 8 films avec l’association de propriétaires de salles la First National Pictures. Construction de son propre studio près de Sunset Boulevard avec les meilleures installations et équipements disponibles. Le studio est inauguré en janvier 1918 et Chaplin dispose d’une grande liberté pour la réalisation de ses films.  Il tourne Charlot soldat met en scène Charlot dans les tranchées avec 4 mois de tournage, avec au final un film de 45 minutes qui rencontre son public.

 

 

 

 

 

Une vie de chien Chaplin révèle Charlot comme une sorte de Pierrot ou « clown triste »  avec une attention grandissante pour l’intrigue et l’image de Charlot comme une sorte de Pierrot. Le film est décrit par le critique français Louis Delluc comme la première œuvre d’art totale du cinéma. 

 

 

 

 

 

1919 – THE KID.

 

Jackie Coogan, célèbre à l’âge de sept ans avec le film Chaplin et gagne plus de quatre millions de dollars de l’époque. Il ne reçois qu’une partie de cet argent utilisé par sa mère et son beau-père. Un procès gagné en 1935 lui permet de récupérer la somme de 126 000 dollars. Ce combat juridique aboutit à la California Child Actor’s Bill, une loi californienne visant à protéger les revenus des acteurs mineurs. Dans les années 1920, il est le garçon le plus célèbre d’Amérique. Durant la Seconde Guerre mondiale, Coogan demande à être transféré dans l’armée de l’air afin d’y faire valoir ses aptitudes de pilote dans le civil. Il effectue une partie de son service en Inde en tant que pilote de planeurs. Il meurt en 1984 à l’hôpital de Santa Monica d’une crise cardiaque. Le tournage dure neuf mois, jusqu’en mai 1920, et sa durée de 68 minutes en fait le plus long du cinéaste. Marqué par les thèmes de la pauvreté et de la séparation, le film parle de sa propre enfance. Il est un des premiers à associer la comédie et le drame. Le succès est immédiat à sa sortie en janvier 1921, distribué dans plus de 50 pays dans les trois années qui suivirent. Chaplin consacre cinq mois à son film suivant de 31 minutes, Charlot et le Masque de fer. Après sa sortie en septembre 1921, termine son contrat avec la First National avec Jour de paye en février 1922 et Le Pèlerin un an plus tard.

 

Chaplin et la souffrance humaine…La souffrance possède une positivité. En effet, loin de les détruire, les misérables développent une sensibilité qui les place au-dessus du reste de la société. Chaplin en est l’incarnation autant que les personnages du Kid. La souffrance n’est pas le mélodrame, mais le sentiment de la misère, une philosophie de l’émotion intérieure. C’est pourquoi Chaplin n’accuse pas, ni ses parents ni la société, mais témoigne. Le rêve semble être présenté comme l’échappatoire d’une réalité trop sombre. On est donc loin du happy dans ce drame de la paternité.

 

 

 

UNE OEUVRE A PART...

Certainement le plus beau film de Charlie Chaplin et le plus philosophique avec une véritable vision sur la paternité et l’enfance. Dans ce film, un drame pur le rire naît le plus souvent d’un comique de situation, et non de la pantomime habituelle chez Chaplin. Le scénario est étudié et les situations dramatiques sont traitées dans un style réaliste qui préfigure ses films suivants. Le film part d’une situation initiale pathétique (l’abandon d’un enfant). Pourtant, le tour de force du réalisateur est de ne pas tomber dans le sentimentalisme ou le pathos exagéré. Autobiographique il reproduit l’enfance misérable de Chaplin, le besoin de la mère. Charlie Chaplin et l’enfant partagent leur adoption. Comme tous les hommes sensibles et émotifs, Chaplin aimait les enfants, mais ils le terrifiait. D’un point de vue psychanalytique, nous pouvons poser que le gamin est Chaplin lui-même et que l’adoption symbolise le désir inconscient d’avoir un père, un père que Chaplin connaissait à peine. Dans la phase de séparation avec l’enfant, Chaplin revit sa propre enfance et atteint le plus haut sommet d’intensité dramatique. Il présente la paternité comme une symbiose contre le reste de la société, une paternité en lutte en quelque sorte. Le Policier incarne cet “Autre” hostile contre lequel l’enfant doit être protégé. La fin du film est un véritable poème d’amour et de tendresse, où les sentiments sont magnifiés, renforcé par la misère et le malheur. The Kid occupe une place à part dans l’œuvre de Chaplin dans la mesure où, en racontant l’histoire d’un orphelin recueilli par Charlot, le cinéaste revit en quelque sorte sa propre enfance pauvre dans les faubourgs miséreux de Londres. Or justement ce qui fonctionne dans cette photo c’est l’effet de double, comme si le film incarnait une sorte de Charlot miniature. On le devine dans la tenue du gosse mais aussi dans sa posture (mains croisées/bras croisés) renvoyant au mimétisme inconscient de l’enfant qui fait tout comme son père, et jusqu’au regard quelque peu frondeur que sa casquette à la Gavroche accentue (et qui rappelle bien sûr le caractère espiègle de Charlot). Il me semble ainsi que l’essentiel du succès de cette photo tient à cet effet de miroir attendrissant, symétrie presque parfaite que soulignent les diverses verticales et l’encadrement de la porte.

 

 

 

Regard Caméra…

Le kid regarde vers un hors-champ situé à droite de l’image alors que Charlot regarde lui fixement l’objectif. De la sorte il capte toute notre attention, de plus que les yeux de Chaplin se situent sur une ligne de force (une diagonale) et son visage blanchi se détache parfaitement du fond noir qui l’encadre. Marque de fabrique de Charlot-Chaplin qui l’utilisera fréquemment dans ses films pour créer une connivence avec le spectateur qu’il prend à témoin. Mais ici, ce regard semble plus profond, plus grave. Chaplin paraît nous dire quelque chose, une chose que le kid qui regarde ailleurs semble ignorer. Le temps d’une pause entre deux prises, Charlie ne joue plus la comédie mais se souvient d’un père alcoolique absent, d’une mère instable régulièrement internée, la précarité, la faim, la débrouille…Un regard photographié en légère contre-plongée qui semble nous juger ou du moins nous interpeller en nous prenant à partie. On le sait, chez ce génie du 7eme Art, la tragédie côtoie constamment la comédie. Et c’est bien là tout le talent de Chaplin que de ne pas limiter son expression à la seule farce burlesque mais de toujours mêler le gag à la réflexion. Un regard franc surtout où l’on devine une forme de fierté, comme une revendication. Charlot, malgré son extrême pauvreté, ne détourne pas les yeux mais regarde droit devant lui, fier de ce qu’il est, un damné de la terre peut-être mais aussi un père épanoui. Quant au Chaplin millionnaire, on sait qu’il ne renia jamais ses origines et cette photo-vérité de Charlot-Chaplin est là pour le rappeler.

 

 

Son Image.

Dès sa deuxième apparition à l’écran en 1914 Chaplin crée son personnage emblématique du vagabond Charlot qu’il n’aura de cesse d’interpréter jusqu’en 1940. Le coup de génie tient à peu de chose…Un chapeau melon trop petit, un veston trop serré, des pantalons trop larges et des chaussures trop grandes, sans oublier la fameuse moustache en brosse, la démarche en canard et la canne aristocratique, et voilà esquissée la silhouette la plus célèbre du XXe siècle. Que ce personnage ait été un clochard n’est bien sûr pas étranger à son succès. En se situant au plus bas de l’échelle sociale, Charlot ne pouvait que susciter la sympathie de tous, du prolo au bourgeois, du simple fait qu’il ne menace personne et suscite plutôt une tendre compassion, même si Chaplin s’est toujours gardé de tomber dans le misérabilisme. Il n’empêche tous les signes présents dans cette image renvoient à la pauvreté avec ses godasses usées ou trouées, les pantalons déchirés et rafistolés, les vêtements à la propreté douteuse et jusqu’aux doigts sales du kid. Sans compter le décor (construit en studio) avec ses murs grossiers et noircis, sa porte bricolée et son pavé jonché de détritus. Au bas de la marche, on peut même remarquer un trou de souris qui évoque par analogie l’entrée de l’immeuble, véritable « trou à rats » où logent les deux personnages.

 

 

 

Je suis entré pour l’argent, et l’art en est né.

Si les gens sont déçus, je n’y peux rien. C’est la vérité.

 

 

 

 

Janvier 1916.

Création d’United Artists par les 4 fantastiques. Une révolution pour l’industrie cinématographique, car les quatre fondateurs peuvent personnellement financer leurs œuvres et avoir un contrôle total sur elles. Chaplin impatient de commencer avec sa nouvelle entreprise, propose de racheter son contrat. Le studio refuse et insiste pour qu’il livre les six derniers films qu’il a promis. Il devra attendre 6 ans pour retrouver son indépendance.

 

Charles Spencer Chaplin   Mary Pickford   Douglas Fairbanks 

 David Wark Griffith // United Artists corporation.

 

 

 

 

 

 

1922 – A woman of Paris.

Libre de réaliser ses films en tant que producteur indépendant. Il souhaite voir un film réaliste et demande à ses acteurs de jouer de manière retenue, expliquant que dans la vie réelle les hommes et les femmes essayent de dissimuler leurs émotions plutôt que de vouloir les montrer. L’Opinion publique en septembre 1923 est acclamée par la critique pour son approche subtile. Le public n’est pas intéressé par un film sans Charlot et c’est un échec. 

 

 

 

 

 

 

 

1925 – THE GOLD RUSH.

 

Chaplin revient à la comédie mais le film doit être une épopée ! Inspiré par une photographie de la ruée vers l’or du Klondike de 1898 et par le récit de l’expédition Donner de 1846-1847, il réalise une comédie épique sur un sujet grave. Charlot est un prospecteur solitaire affrontant l’adversité à la recherche de l’amour. Avec Georgia Hale comme partenaire, Chaplin tourne dans les montagnes de l’ouest du Nevada en février 1924. La production est complexe, avec plus de 600 figurants, des décors extravagants et des effets spéciaux la dernière scène réalisée en mai 1925 après 15 mois de tournage. Chaplin considère que son film est le meilleur réalisé jusque-là. Le film sort en Août 1925 et devient l’un des plus gros succès du cinéma muet, avec cinq millions de dollars (140 millions de dollars de 2020 de recettes). La comédie comporte certaines des scènes les plus célèbres de Chaplin, comme celle de Charlot mangeant sa chaussure ou celle dite de la « danse des petits pains » Chaplin souhaiterait que les gens se souviennent de lui grâce à ce film.

 

 

 

 

 

Film Magique !

On ne compte plus les scènes d’anthologie que comportent le film. La tempête de neige, le numéro d’équilibriste du refuge au bord du précipice ou encore le numéro de danse à base de miche de pain le soir du nouvel an sont autant de moments magiques et éternels entrés dans la légende du Septième Art et dans l’esprit collectif. Tout comme Charlot, le vagabond solitaire, naïf et affable, crée il y a un plus d’un siècle (1914) par le génie absolu de Chaplin. Car s’il excelle dans la finesse du jeu, du sens du burlesque, du cadre et dans l’intelligence corporelle, Charles Chaplin sait également manier de fort belle manière la hauteur, la durée, l’intensité et le timbre des sons musicaux. La musique est composée de sa main et se révèle être d’une beauté aussi incroyable que surprenante et emprunte tant à Brahms, qu’à Wagner, son Ô toi ma belle étoile du soir de son opéra Tannhauser évoque la faim, Tchaïkovski avec la Belle au bois dormant, audible à plusieurs reprises ou bien-sûr Rimsky-Korsakov dont le rythme effréné du Vol du bourdon image à la perfection la célérité des bourrasques de vent de la tempête qui fait hors du refuge et dedans également.

 

 

 

 

 

 

 

2 petits pains + 2 fourchettes

Scène mythique  du cinéma.

 

Le génie explose ! Les cadres fourmillent de détails et d’idées ingénieuses.  Une chaussure bouillie est mangée à la fois comme une volaille (le cuir), des arrêtes de poisson (la semelle cloutée) et des spaghettis (les lacets). Pourtant il y a dans la Ruée vers l’or un onirisme et une gravité qui en font une œuvre à part et marquante. Salut et meurtre, amour et haine, vie et mort, enfance et vieillesse, ici plus qu’ailleurs marchent côte à côte. Une œuvre qui fait appel à l’enfant enfoui en chacun de nous et lui montre, sous couvert de l’humour, la violente réalité de l’homme adulte. Et sa contradiction…Si le petit mot d’amour écrit par Georgia est d’abord destiné à Jack Cameron, le Beau Brummell de la bourgade, c’est par ce dernier qui voulait se moquer, qu’il atterrira finalement dans les mains du pauvre Charlot et fera de lui l’homme qu’il deviendra.

 

 

 

 

 

1924 / Vie privée.

Chaplin se marie une deuxième fois. avec Lita Grey une jeune actrice qui devait apparaître dans le film et dont la grossesse imprévue oblige Chaplin à l’épouser. Elle a 16 ans et lui 35, et selon la loi californienne cette relation peut être qualifiée de viol sur mineure. Il organise une cérémonie discrète au Mexique le 24 novembre 1924. Lita accouche d’un premier fils, Charles Chaplin Jr., le 5 mai 1925, et d’un second, Sydney Earle Chaplin le 30 mars 1926. En novembre 1926, sa femme quitte leur foyer avec ses 2 enfants. Chaplin accepte en août 1927 de payer 600 000 $ (environ 18 millions de dollars de 2020). 

 

 

 

 

 

 

J’aime toujours marcher sous la pluie,

Afin que personne ne puisse me voir pleurer.

 

 

 

 

 

1928 – THE CIRCUS.

 

Film méconnu. Charlot, vagabond, est pris pour un pick-pocket par un policier qui le prend en chasse. Il se réfugie sous le chapiteau d’un cirque et perturbe tous les numéros pour le plus grand plaisir des spectateurs. Le directeur du cirque l’embauche en tant qu’homme de piste. Chaque soir, à cause de sa maladresse, il déchaîne l’hilarité de l’assistance et devient à son insu la vedette du spectacle. Il tombe amoureux d’une belle écuyère, Merna, fille du directeur, mais celle-ci préfère Rex, le funambule. L’actrice principale, Merna Kennedy, avait été recommandée à Chaplin par sa deuxième épouse, Lita Grey. Quand celle-ci découvre la liaison entre les deux comédiens, elle entame une procédure de divorce et fait tout pour empêcher le film de voir le jour. Le tournage est interrompu pendant plusieurs mois, et il faut dissimuler les bobines déjà réalisées pour éviter la destruction. Le Cirque sort en janvier 1928. Chaplin ne le mentionne pas dans son autobiographie. Lors de la première cérémonie des Oscars de 1929, Chaplin reçoit un Oscar d’honneur pour la polyvalence de son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire. 

 

 

 

 

Ma douleur peut être la raison du rire de quelqu’un.

Mais mon rire ne doit jamais être la cause de la douleur de quelqu’un.

 

 

 

 

1931 – CITY LIGHTS.

 

Considéré comme l’un de ses plus grands films. Chaplin est sceptique face au nouveau cinéma sonore. Il craint de donner une voix à Charlot. Rejette cette mode hollywoodienne et travaille sur un nouveau film muet…Je suis résolu à continuer la réalisation de films muets…Je suis un mime et dans ce registre unique et, sans fausse modestie, un maître. Après un an d’écriture et de préparation le tournage débute à la fin de l’année 1928, Les Lumières de la ville met en scène l’amour de Charlot pour une fleuriste aveugle, jouée par Virginia Cherrill, et ses efforts pour lever des fonds pour une opération destinée à lui rendre la vue. Chaplin rapporte qu’il a travaillé jusqu’au bord de la folie pour obtenir la perfection et le tournage dure 21 mois à un moment où les films muets deviennent anachroniques.

 

Personne d’autre que Charlie Chaplin n’aurait pu le faire. Il est le seul à avoir ce quelque chose d’étrange appelé attrait de l’audience en quantité suffisante pour défier le penchant populaire pour les films qui parlent.

 

 

 

Parle nous d’Amour…

Chaplin est la seule star du burlesque à avoir joui d’un prestige si établi que l’avènement du parlant n’a pas enterré sa carrière. Keaton s’est cassé les dents, Lloyd n’a pas fait mieux ? quant aux cinéastes, ils prirent le pas plus facilement que les comédiens. Nous voilà donc en 1931. depuis trois ans, le public se désintéresse graduellement du muet. Le terrain est miné à la sortie des Lumières de la ville, et non sans ironie, c’est avec une histoire de cécité que Chaplin reconquiert un public lassé de ne pas entendre. Outre les qualités intrinsèques au premier film de Chaplin de l’époque du parlant, arrêtons nous un instant sur sa séquence d’introduction et sa valeur historique, induite toute en finesse. Est célébrée en grande pompe l’inauguration d’un monument pour la « prospérité ». La foule est rassemblée devant trois notables, deux hommes et une femme, qui se partagent la parole. Paroles ? Pour tout langage, un gazouillis ridicule, joué au kazou, peut-être par Chaplin lui-même. Les élus passent pour de bruyants canards. Charlot, lui, est encore curieusement absent. Il semble se jouer là un rituel auquel il n’est plus convié, une nuisance sonore, un charabia qui l’a laissé sur le quai. Bientôt, la notable tire le ruban et découvre la statue, mais sous le drap blanc se cache le tramp, brutalement sorti de son sommeil, lové sur les genoux d’une rutilante sculpture. S’ensuit un numéro de pantomime où Charlot, sous les sifflets de la foule peine à quitter l’énorme statue, accroche sa culotte sur une épée, s’assoit sur le nez d’un demi-dieu, nargue l’assemblée, puis finit par filer. Vous ne vous débarrasserez pas si facilement de moi, semble nous dire Chaplin à travers cette scène, qui ne s’articule aucunement avec le film lui même et a tout d’une allégorie de l’avènement mirobolant du sonore. L’élite a lancé à la foule un nouvel objet de désir, elle a remplacé les vieux jouets. Mais les étoiles du muet entendent bien rester sur le devant de la scène, et pour faire valoir leur droit, n’ont qu’à prouver qu’elles savent encore mieux que tous les parlants faire rire et pleurer. Charlot s’échappe donc par dessus le grillage, et la caméra le suit loin du vacarme, comme pour lui donner sa chance. Il rencontre bientôt une aveugle qu’il s’emploiera à séduire, en se faisant passer pour un riche gentleman. Séduire une femme qui ne voit pas, émouvoir un public qui n’entend pas…Les deux entreprises se juxtaposent facilement. Chaplin propose un très métalinguistique manifeste pour la privation sensorielle. La surdité c’est une lapalissade dans toutes les écoles du cinéma  ramène le cinéma à la pure grammaire de son langage, elle le pousse à éviter le bavardage, à signifier à travers lui-même, sa mise en scène, son montage. Les Lumières de la ville est un véritable manifeste pour le muet, et surtout une démonstration de force pour l’homme à tout faire qu’est Chaplin le scénariste, réalisateur, acteur, monteur, compositeur de la musique et producteur. Rien de son talent d’homme-orchestre ne s’est éteint. La flamme Chaplin est bien vive. On rit encore de bon cœur, de même qu’on est souvent touché et même à la fin, bouleversé par l’extrême pudeur de cette histoire d’amants qui ne se voient pas et se touchent à peine. Les Lumières de la ville procède par petites touches, pleines d’une humilité inhérente à la concision du muet. Les tours de passe-passe mis en œuvre par Chaplin pour offrir à la jeune aveugle une présence un regard dans le monde la rendent bien plus émouvante que ne le serait une voyante. Inutile de voir ou d’entendre. L’imagination fait le reste, comme dans ce champ-contrechamp final où pour tout baiser, Chaplin se contente de tenir une main. La nôtre, sûrement.

 

 

 

 

C’est un monde sans pitié et il faut être impitoyable pour y faire face.

 

 

 

 

1936 – MODERN TIMES.

 

Chaplin hésite dans le choix technique de son prochain film…Avec ou sans dialogues. A partir de 1931 il arrête de tourner pendant 16 mois. Visite l’Europe de l’Ouest et décide de se rendre dans l’Empire du Japon. 15 mai 1932 des officiers nationalistes tentent un coup d’État, assassinent le premier ministre du Japon Tsuyoshi Inukai, son fils Takeru Inukai assistait à une compétition de sumo avec Charlie Chaplin, ce qui leur a probablement sauvé la vie. Dans son autobiographie, Chaplin note qu’à son retour à Los Angeles en juin 1932, il est perdu et sans but, fatigué et conscient d’une extrême solitude. Son séjour à l’étranger avait été très stimulant pour Chaplin, qui avait rencontré plusieurs personnages influents, et s’intéresse de plus en plus aux questions internationales. L’état du monde du travail américain durant la Grande Dépression le trouble et il craint que le capitalisme et les machines ne provoquent un fort taux de chômage. Chaplin prépare Les temps modernes en 1934, comme son premier film parlant. Il abandonne et reprend un format silencieux avec des effets sonores synchronisés. L’expérience du dialogue confirme sa conviction inébranlable en le fait que la popularité universelle de Charlot sera perdue s’il parle à l’écran. Le film est  tourné à « vitesse silencieuse » soit 18 images par seconde, ce qui, quand il est projeté à la « vitesse sonore » de 24 images par seconde, rend l’action encore plus frénétique. Des copies du film corrigent maintenant ce point. Le tournage du film est long…Du 11 octobre 1934 au 30 août 1935. La référence aux drogues lors de la séquence de la prison est très osée pour l’époque, étant donné que le code Hays, établi en 1930, interdisait toute forme de représentation et d’utilisation de drogues illégales dans les films. Chaplin avait déjà fait des références à la drogue auparavant, dans l’un de ses plus célèbres courts métrages, Charlot policeman, sorti en 1917.

 

 

 

 

Les Temps modernes

L’une des plus grandes réussites de Chaplin, et reste un de ses films les plus populaires. Il s’agit du premier film ouvertement politique de Chaplin, et son portrait peu flatteur de la société industrielle généra des controverses dans certains quartiers au moment de sa sortie initiale. Le film attire les critiques du fait de son caractère quasi-totalement silencieux, alors que l’industrie du film maîtrise et apprécie le film parlant. Chaplin craignait que le mystère et le romantisme de Charlot soit ruiné s’il devait parler, et craignait de «marginaliser» ses fans de pays non anglophones. Ses films suivants, cependant, seront entièrement parlants.

 

Paulette Goddard 21 ans va inspirer à Charlie Chaplin 43 ans le rôle de la gamine des Temps modernes. C’est leur rencontre qui va la propulser au rang de star. Pour le film, elle prend des cours de chant, de danse et répète inlassablement des scènes du film jusqu’à l’épuisement. Épuisé par le tournage, le couple embarque en février 1936 pour une croisière en Extrême-Orient et, au cours du voyage, les amants se marient, une union qui reste secrète, une des raisons qui lui fera ne pas être prise pour le rôle de Scarlett dans “Autant en Emporte le Vent”.

 

 

 

 

C’est la lutte finale…

Le film apparait comme une parodie du fordisme, ce nouveau mode de production inventé par Henry Ford, fondé sur la spécialisation et la division des tâches afin d’augmenter la productivité des travailleurs. Mais le film n’a pas qu’une portée économique, il a bien un objectif social, la défense de l’homme en tant qu’homme. Chaplin dénonce l’aliénation, reprenant ainsi une thématique chère à Karl Marx, générée non seulement par le travail à la chaîne, mais par le système économique capitaliste tout entier. L’homme n’étant plus propriétaire ni des biens qu’il produit, il ne s’appartient plus lui-même. Il devient étranger à lui-même, une pure force de travail à la merci des propriétaires des moyens de production. Cependant, Chaplin ne prône pas le socialisme, il ne dessine pas de solution sociale, son film est essentiellement dénonciateur. Autre thème marxien, la lutte des classes. Chaplin matérialise les rapports de production de manière assez brute. Les ouvriers sont en bas à la chaîne, les directeurs en haut. Mais Chaplin semble indiquer que tous sont victimes du même système, puisque même le directeur prend des pilules pour résister à la pression du milieu. L’homme devenu machine n’est plus qu’un esclave des machines qui l’entoure. Ceci renvoie aussi au mythe de Frankenstein, lequel indique la possibilité que l’homme soit dépassé par les technologies qu’il crée. De technique utile à l’homme, l’usine, selon Chaplin, serait le symbole d’une perte de contrôle de l’homme sur les objets qu’il a crée. Pire, les machines se rendent indépendantes de l’homme puisqu’elles n’ont plus besoin de lui pour fonctionner (en témoigne la scène de la pause-déjeuner)

 

La scène suivante, dans laquelle le héros provoque la panne générale de l’usine, est l’occasion de montrer sa joie, la première fois depuis le début du film. Ainsi, la spontanéité du rire se construit sur la négation des machines et de la mécanisation. Cette scène laisse entrevoir la possibilité pour l’homme de corriger l’entreprise de déshumanisation qu’il a entreprise contre lui-même. Mais la solution semble pire que la maladie. En effet, interné en psychiatrie puis relâché, Chaplin doit faire face à la Grande Dépression et la fermeture des usines. La situation est au moins aussi difficile qu’en usine. Comme il erre dans les rues, Charlie voit un drapeau rouge d’avertissement tomber d’un camion. Il le ramasse et l’agite pour signaler au chauffeur de s’arrêter. Le conducteur ne le remarque pas, mais une manifestation massive de chômeurs se met derrière ce drapeau, symbole de leur lutte. Chaplin se retrouve ainsi involontairement porte-drapeau de la colère des travailleurs. Arrêté en tant que chef de file du mouvement, il se rend compte que la vie de prisonnier est plus agréable que celle du travailleur ou celle du chômeur. Finalement libéré, Chaplin se lie avec une jeune femme dont la condition est précaire. Ils finiront par trouver un bonheur fragile dans un cabaret, en tant qu’artiste.

 

 

 

 

 

 

La haine des hommes passera et les dictateurs mourront,

et le pouvoir qu’ils auront pris au peuple reviendra au peuple.

Et tant que les hommes mourront, la liberté ne périra jamais.

 

 

 

 

1940 – THE DICTATOR.

Perturbé par la montée des nationalismes en Europe dans les années 1930 Chaplin estime qu’il ne peut en faire abstraction dans ses films. Les observateurs avaient déjà noté les ressemblances entre Adolf Hitler et lui…ils sont nés à quatre jours d’écart, ont tous deux accédé à la notoriété mondiale malgré leur origine modeste, et le dictateur allemand porte la même moustache que Charlot. Le Dictateur, se moque d’Hitler et du fascisme. Chaplin consacre deux années à la rédaction du scénario et commence le tournage en septembre 1939 alors que la Guerre mondiale vient d’éclater. Chaplin décide de renoncer au film muet pour délivrer plus facilement un message politique avec la parole. Réaliser une comédie sur Hitler est très délicat, mais son indépendance financière lui permet de prendre le risque “J’étais déterminé à le faire car on doit se moquer d’Hitler”. Chaplin s’éloigne de son personnage de Charlot, tout en conservant son accoutrement, en jouant un « barbier juif » vivant dans une dictature européenne ressemblant considérablement à la dictature hitlérienne. Chaplin répond ainsi aux nazis qui prétendent qu’il est juif. Il joue également le dictateur « Adenoïd Hynkel », parodiant Hitler. Dans le final le barbier juif a pris la place du dictateur, Chaplin prononce un discours de huit minutes face à la caméra, dans lequel il expose ses opinions politiques personnelles. 

 

 

 

 

Considérez que Le Dictateur eût été impossible si Hitler avait été glabre ou…

S’il s’était taillé la moustache à la Clark Gable.

André Bazin

 

 

 

Visionnaire…

La volonté didactique de Charlie Chaplin dans Le Dictateur paraît évidente. Il suffit de revoir le discours qui clôt le film, qu’il n’est pas uniquement destiné aux soldats représentés par le film, mais qu’il s’adresse directement à l’humanité toute entière, qui constitue à l’époque le public de Charlie Chaplin. Hors situation, ou en marge de celle-ci, ce discours réussit le tour de force de suspendre le film, de nous en faire oublier l’anecdote et d’éviter la rencontre voir l’affrontement ? Hynkel/Charlot que nous attendions tous. Cette rencontre aura lieu en fait par le biais de ce discours, mais ce dernier nous renvoie surtout au défi que Chaplin lance à Hitler plus qu’au rapport entre les deux personnages du film. Il semble en outre que ce discours déborde largement la simple volonté de donner une leçon, et qu’au-delà de ce qu’il dit, il dépasse le cadre même du film pour s’inscrire comme un geste exemplaire, définitif ? du personnage de Charlot. Si l’espéranto de la chanson “Titine” de Modern Times avait donné d’abord une voix au personnage de Charlot, et un langage dont l’inintelligibilité venait ajouter à l’universalité de sa gestuelle, The Dictator lui donne la parole, pour la première et la dernière fois. Mais quelle parole ! Huit minutes de discours adressé directement et frontalement au spectateur, avec une maîtrise de tribun au moins égale à celle du dictateur Hynkel. Huit minutes de discours pacifique et humaniste asséné avec une force de conviction qui déclenche autant d’enthousiasme que les discours guerriers du dictateur du film. On peut certes prendre ce discours à la lettre et déclarer comme certains critiques américains de l’époque que Chaplin y “braque sur le public le doigt du communisme”. Mais en regardant de plus près cette séquence, on voit bien que si Chaplin utilise là les même armes que celles de la propagande des dictatures, il s’efforce dans le même temps d’en révéler les effets néfastes, qu’il en passe par le discours pour en montrer les limites et les dangers. Charlot s’adresse d’abord d’égal à égal à son public…Je regrette, mais je ne veux pas être empereur. Ce n’est pas mon métier. Je ne veux pas gouverner ni conquérir qui que ce soit. Il parle ensuite de la radio qui lui permet de s’adresser à des millions de gens à travers le monde, invention dont…la nature même est un appel à la bonté de l’homme, un appel à la fraternité universelle, à l’unité de tous. Voilà des mots qui pourraient aussi définir la nature du cinéma tel que Chaplin le conçoit. C’est donc un message de paix et d’espoir que Charlot va transmettre au moment où on lui donne la parole, à l’instant où la force des événements l’oblige à parler…

 

 

 

 

…Mais s’agit-il encore de Charlot ? André Bazin souligne…La décomposition du personnage qu’il distingue particulièrement dans cette scène…Dans ce plan interminable et trop court à mon gré, je n’ai retenu que le timbre envoûtant d’une voix et la plus troublante des métamorphoses. Le masque lunaire de Charlot peu à peu disparaissait, corrodé par les nuances de la panchromatique et trahi par la proximité de la caméra que multipliait encore le télescope du “grand écran”. En dessous, comme en surimpression, apparaissait le visage d’un homme déjà vieilli, creusé de quelques rides amères, les cheveux traversés de mèches blanches, le visage de Charles Spencer Chaplin. Cette espèce de psychanalyse photographique de Charlot reste certainement l’un des hauts moments du cinéma universel. Il est vrai que le masque tombe lors de cette scène, qu’on oublie Charlot pour ne plus voir et entendre que Chaplin lui-même, comme si le personnage ne pouvait résister à cette parole, au verbe voulu par l’auteur. Car si ce discours nous signifie en quelques mots le message éternel de Charlot, celui-ci ne peut que s’effacer au moment où Chaplin prend rendez-vous avec l’Histoire et “règle son compte” à Hitler.

 

 

Je crois au pouvoir du rire et des larmes

comme antidote à la haine et à la terreur.

 

 

…On remarquera que si Chaplin s’y substitue progressivement à Charlot, il finit par s’effacer lui aussi de l’image. Je veux parler de la toute fin du film : il y a d’abord un temps d’arrêt, vers la fin du discours, où emporté par la force et la conviction qu’il met dans ses paroles, Chaplin lève le bras d’un geste brusque et provoque un tonnerre d’acclamations de la foule qui semblait attendre ce signal pour manifester son enthousiasme. Stoppé dans son élan, comme réveillé de son rêve, il paraît soudain prendre conscience de la présence de cette foule qui l’écoute et l’acclame (c’est d’ailleurs le seul instant depuis le début du discours où l’on voit cette foule en plan de coupe) hagard, notre tribun semble même s’effrayer de la réaction qu’il provoque. Son poing levé est devenu le geste de l’homme surpris ou désemparé qui se passe la main sur le crâne pour se prouver qu’il a encore toute sa tête, qu’il est bien là, qu’il ne rêve pas. Chaplin met à cet instant par le geste son discours à distance, semble s’en extraire en réalisant qu’il a parlé. Cette “prise de conscience” soudaine vient rompre le discours et en changer la nature, émet comme un doute, non sur le contenu mais sur la méthode même du discours. On peut rapprocher ce discours final des discours de Hynkel, qu’on a vus précédemment dans le film. Le contraste est évidemment saisissant, la caricature du dictateur (qui apparaît pour la première fois lors d’un discours) nous le montre en représentation, maître d’un auditoire qui lui obéit au doigt et à l’œil (un simple geste lui suffit pour déclencher ou interrompre les acclamations). Tout le comique de ces scènes est basé sur cette mise en scène de la parole, où le geste et l’imitation du langage tiennent lieu de discours, où le fait d’avoir la parole l’emporte sur ce qui est dit…

 

 

 

 

Je suis en paix avec Dieu. Mon conflit est avec l’homme.

 

 

…Le discours final de n’est pas une parodie de discours mais un message clairement transmis et Chaplin ne s’en tiens pas là…Il s’agit non seulement de donner un message de paix au moment où les dictateurs la menacent, il s’y exprime aussi, dans le geste de mise à distance dont j’ai parlé plus haut, quelque chose comme un doute sur la nécessité d’en passer par le discours. Faire un discours, si beau et plein d’espoir soit-il, ne suffit sans doute pas, il faut aussi souligner le geste du discours. Il faut dire et montrer le dire, avec ses grandeurs et surtout ses limites. Ce brusque coup d’arrêt marque d’ailleurs la fin du discours proprement dit. C’est le moment où, passant à un autre registre et renouant avec l’anecdote du film, le tribun s’adresse non plus à la foule anonyme, mais à Hannah, le fiancée de Charlot, pour lui délivrer directement et nommément son message d’espoir qui devient déclaration d’amour. Chaplin/Charlot disparaît alors de l’écran et on ne verra plus qu’Hannah, cadrée en gros plan, qui entend cette voix qui s’adresse à elle, et lui répond en arborant le sourire de l’espoir qu’elle fait naître en elle. C’est donc finalement par la voix que le lien se renoue entre le discours et le film, que la fusion s’opère, par delà l’image, entre Chaplin et Charlot un instant disjoints, séparés le temps d’un rendez-vous historique. Ce qu’on retiendra, au bout du compte, c’est moins le contenu du discours que le geste inouï qu’il représente, le culot magistral dont il fait preuve. A cause d’une moustache, dont Bazin a si bien parlé, on attendait Chaplin sur le terrain de la caricature et du pamphlet, mais voilà qu’il ne se contente pas de gifler Hitler, comme on le lui demandait, mais qu’il s’érige en donneur de leçon et anéantit au passage les idées bien pensantes qu’on attendait de lui. C’est faire injure à Chaplin de l’attendre sur le terrain de la caricature. C’est lui faire injure aussi que de juger son discours superflu et d’y voir une simple leçon d’humanisme. Si on doit ce film à une moustache, il fallait bien un discours interrompu pour nous l’expliquer.

 

 

 

Le miroir est mon meilleur ami

Parce que quand je pleure, il ne rit jamais.

 

 

 

 

 

 

 

Vie privée.

Dans le milieu des années 1940, Chaplin est impliqué dans une série de procès qui accaparent une grande partie de son temps et affectent son image publique. Ces derniers sont liés à sa relation intermittente avec une jeune actrice. J.Edgar Hoover, le directeur du FBI inculpe Chaplin dans quatre affaires reliées à ce scandale. Chaplin est en particulier accusé d’avoir violé le Mann Act qui interdit le transport entre États de femmes à des fins sexuelles et risque 23 ans de prison.  Chaplin a 54 ans, épouse sa nouvelle jeune protégée de 18 ans, Oona O’Neill, la fille du dramaturge américain Eugene O’Neill. Dans son autobiographie, il décrit leur rencontre comme l’événement le plus heureux de sa vie et découvre le « parfait amour ». Ils seront mariés jusqu’à sa mort en 1977 et auront huit enfants…Geraldine Leigh (1944), Michael John (1946), Josephine Hannah (1949), Victoria (1951), Eugene Anthony (1953), Jane Cecil (1957), Annette Emily (1959) et Christopher James (1962).

 

 

 

 

 

 

 

 

1945 – 1953 / Une vie après Charlot ?

 

 

 

 

1947 – MONSIEUR VERDOUX.

Premier film sans Charlot, avec un premier échec critique et populaire aux États-Unis. Comédie noire sur un employé de banque français réduit au chômage et qui épouse et assassine de riches veuves pour subvenir aux besoins de sa famille. Chaplin exprime à nouveau ses idées critiques sur le capitalisme. Chaplin est fier et considère son film le plus intelligent et plus brillant. L’accueil négatif aux USA représente l’évolution de son image publique. Accusé d’être communiste pour sa campagne à l’ouverture d’un second front pour soulager les Soviétiques. Proche de sympathisants communistes comme Bertolt Brecht. Chaplin est considéré comme progressiste et amoral. Le FBI déterminé à lui faire quitter le pays lance une enquête officielle à son encontre en 1947. Chaplin à toujours nié être communiste mais comme un pacifiste qui estimait que les actions du gouvernement américain pour réprimer une idéologie étaient une violation inacceptable des libertés publiques. il proteste ouvertement contre les procès des membres du parti communiste américain devant le House Un-American Activities Committee et convoqué par ce dernier. 

 

 

 

 

 

 

1952 – LIMELIGHTS.

Chaplin en star de music-hall dans une autobiographie en référence à son enfance, à la vie de ses parents et à sa perte de popularité aux États-Unis. Après trois ans de préparation, début du tournage novembre 1951 et adopte un ton plus sérieux que dans ses précédents films avec de la «mélancolie». Chaplin embarque avec sa famille à bord du paquebot transatlantique Queen Elizabeth le 18 septembre 1952 pour la première mondiale à Londres. Le lendemain, le procureur général des États-Unis, James McGranery, révoque son visa. Chaplin décide de rompre tous ses liens avec les USA.

 

 

 

 

« Que je revienne ou non dans ce triste pays avait peu d’importance pour moi. J’aurais voulu leur dire que plus tôt je serais débarrassé de cette atmosphère haineuse, mieux je serais, que j’étais fatigué des insultes et de l’arrogance morale de l’Amérique. J’ai fait l’objet de calomnies et d’une propagande orchestrée par de puissants groupes réactionnaires qui, par leur influence et l’aide de la presse jaune américaine, ont créé une atmosphère malsaine dans laquelle les individus aux tendances libérales peuvent être persécutés. Dans ces conditions, j’ai trouvé qu’il était virtuellement impossible de continuer mon travail de réalisation cinématographique et j’ai par conséquent abandonné mon séjour aux États-Unis. »

 

 

 

 

Avec Buster Keaton, voir ces deux Géniaux artistes travailler ensemble !



 

 

 

 

 

 

1953 – 1977. Les années Européennes.

Le couple et la famille s’installe en Suisse en Janvier 1953, au manoir de Ban, une propriété de 15 hectares surplombant le lac Léman dans la commune de Corsier-sur-Vevey. Chaplin  vend sa résidence et son studio de Beverly Hills et rend son visa en avril. L’année suivante, sa femme renonce à sa nationalité américaine pour devenir Britannique. Abandon de ses derniers liens professionnels avec les États-Unis en 1955 quand il vend ses parts dans la United Artists.

 

 

 

1957 – A KING IN NEW-YORK.

Chaplin travaille sur son premier film européen en 1954 pour jouer un roi exilé cherchant asile aux États-Unis. Cette satire politique parodie contre l’HUAC ainsi que le consumérisme de la société américaine des années 1950. Son film le plus acide et le plus ouvertement personnel de Chaplin. Tournage difficile car il était habitué à son studio et à ses équipes hollywoodiennes, et ne dispose plus d’une durée de production illimitée. Chaplin empêche les journalistes américains d’assister à la première à Paris et décide de ne pas diffuser le film aux États-Unis qui sera présenté en 1973. Chaplin se concentre sur la sonorisation et réédition de ses anciens films, ainsi que sur la protection de ses droits d’auteur. Aux États-Unis, l’atmosphère politique évolue et l’attention du public se tourne à nouveau vers les films de Chaplin. 

 

 

 

 

 

1967 – A COUNTESS FROM HONG-KONG.

Une comédie romantique basée sur un scénario de Chaplin écrit dans les années 1930 pour Paulette Goddard. Situé sur un paquebot, l’action met en scène Marlon Brando ambassadeur américain et Sophia Loren une passagère clandestine. C’est échec commercial profondément affecté par ce revers Chaplin ne réalisera plus…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1971 – Chaplin est fait commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur lors du festival de Cannes et l’année suivante il reçoit un Lion d’or pour sa carrière durant la Mostra de Venise.

 

1972 – Hollywood lui décerne un Oscar d’honneur. Chaplin reviens à L.A après 20 ans d’absence. Il reçoit une ovation, la plus longue de toute l’histoire des Oscars. Charlie Chaplin “Charlot” meurt apaisé, entouré de sa famille le 25 décembre 1977, à l’âge de 88 ans.

 

 

 

 

 

 

 

 

La vie est un jeu qui ne permet pas de tester. Alors, chante, pleure, danse, rigole et vis intensément, avant que le rideau ne se ferme et que la pièce ne se termine sans applaudissements…

 

 

 

 

 

 

 

Ses inspirations…

 

Chaplin considère que sa première inspiration est sa mère qui l’amuse en s’asseyant à la fenêtre et en imitant les passants…C’est grâce à elle que j’ai appris non seulement à exprimer des émotions avec mes mains et mon visage mais également à observer et à étudier les gens. Les années de Chaplin dans le music-hall lui permettent d’observer le travail des comédiens, il assiste également aux spectacles de mime de Noël au théâtre de Drury Lane, où il étudie l’art de la frivolité. Ses années dans la compagnie de Fred Karno ont un effet formateur sur sa carrière d’acteur et de réalisateur. Il apprend à associer le tragique avec la comédie et à utiliser des éléments absurdes qui sont récurrents dans ses films. Chaplin s’appuiera sur  les films du comédien français Max Linder, qu’il admire. En développant le costume et le jeu de Charlot, il s’inspire de la scène de vaudeville américaine où les personnages de vagabond étaient courants.

 

 

 

 

L’imagination ne signifie rien sans faire.

 

 

 

 

Sa Méthode…

 

Chaplin parlait peu de sa technique et avançait que cela était comme dévoiler ses secrets pour un magicien. On sait donc peu de chose sur ses manières de travailler. Avant Le Dictateur Chaplin ne commençait jamais un tournage avec un scénario achevé. Pour ses premiers films, il n’avait qu’une vague idée de départ comme « Charlot se rend dans une station thermale » ou « Charlot travaille comme prêteur sur gage ». Il faisait ensuite réaliser les décors et travaillait avec les autres acteurs pour improviser des effets comiques tout en affinant le scénario tout au long de la production. Alors que les idées étaient acceptées ou rejetées, une structure narrative émergeait et Chaplin était souvent obligé de retourner des scènes qui pouvaient aller à l’encontre de l’histoire. À partir de L’Opinion publique Chaplin  réalise à partir d’un scénario préétabli, mais tous ses films, jusqu’aux Temps modernes continuent à subir des modifications jusqu’à atteindre leur forme finale. En réalisant des films de cette manière, Chaplin a besoin de plus de temps que tout autre réalisateur. S’il est à court d’idées, il s’éloigne du studio pendant plusieurs jours, tout en maintenant ses équipes prêtes dès que l’inspiration revient. Le processus de réalisation est également ralenti par son perfectionnisme. Comme il finance personnellement ses films, Chaplin a toute liberté pour atteindre cet objectif et réaliser autant de prises que nécessaire. Leur nombre était ainsi souvent excessif…Chaque prise terminée pour Le Kid en avait nécessité 53 tandis que pour réaliser les 20 minutes de L’Émigrant il utilisa plus de 12 000 m de pellicule, une longueur suffisante pour faire un long-métrage. Aucun autre réalisateur n’a si complètement dominé tout aspect du travail et fait tous les métiers. S’il pouvait Chaplin jouerait tous les rôles et cousu tous les costumes…Ses méthodes de production était au bord de la folie, et complètement épuisé par les tournages. Dans ses dernières années, son travail avait la priorité sur tout et tout le monde. Le mélange d’improvisation et de perfectionnisme qui se traduisait par des jours d’efforts et des milliers de mètres de pellicule gâchés, se révélait éprouvant pour Chaplin qui pouvait se déchaîner contre ses acteurs et ses équipes. Chaplin exerçait un contrôle complet sur ses films, au point qu’il mimait les autres rôles et voulait que ses acteurs l’imitent exactement. Il effectuait personnellement le montage de tous ses films et fouillait dans les grandes quantités de pellicules pour créer le film qu’il voulait.

 

 

 

 

Je suis pour les gens. Je ne peux pas m’en empêcher.

 

 

 

 

Son Style & Ses Thèmes…

 

Si le style comique de Chaplin est généralement qualifié de slapstick, il est considéré comme retenu et intelligent, son travail comme un mélange de comédie physique gracieuse et de comique de situation bien réfléchi. Chaplin s’éloigne du slapstick traditionnel en ralentissant le rythme de l’action et en se concentrant sur la relation du spectateur avec les personnages. les effets comiques sont centrés sur l’attitude de Charlot aux choses qui lui arrivent…L’humour ne vient pas du fait que Charlot rentre dans un arbre, mais qu’il soulève son chapeau pour s’excuser, les « manières excentriques » de Chaplin et son comportement sérieux au cœur du slapstick sont d’autres aspects centraux de son style comique. Les films muets de Chaplin suivent les efforts de Charlot pour survivre dans un monde hostile. Même s’il vit dans la pauvreté et  fréquemment maltraité, il reste gentil et optimiste, défiant sa position sociale, il s’efforce d’être vu comme un gentleman. Charlot s’oppose aux figures de l’autorité et donne autant qu’il reçoit, représentant les défavorisés…Un Monsieur Tout-le-monde devenant un sauveur héroïque. Plusieurs films se terminent avec Charlot démuni et seul marchant avec optimisme vers le soleil couchant pour poursuivre son voyage. L’emploi du pathos est un aspect bien connu de l’œuvre de Chaplin avec sa capacité à provoquer les rires et les larmes. Chaplin s’appuie parfois sur des événements tragiques pour ses films comme dans La Ruée vers l’or qui fut inspirée par le destin malheureux de l’expédition Donner. Différents thèmes sont représentés dans ses premières comédies comme l’avarice, l’abandon et des sujets plus controversés comme l’immigration ou la drogue. Les commentaires sociaux sont également importants dans ses premiers films, car il représente les démunis sous un jour positif et soulignait leurs difficultés. Chaplin développe un grand intérêt pour l’économie et partage ses opinions dans ses films. Les Temps modernes illustre les conditions de travail difficiles des ouvriers de l’industrie, Le Dictateur parodie Hitler et Mussolini et se termine par un discours contre le nationalisme, Monsieur Verdoux critique la guerre et le nationalisme tandis qu’Un roi à New York attaque le maccarthysme. Chaplin intègre plusieurs éléments autobiographiques dans ses films et le psychologue Sigmund Freud considère qu’il se représente toujours comme il était dans sa triste enfance. Le Kid reflète le traumatisme qu’il a subi dans un orphelinat, tandis que le personnage principal des Feux de la rampe fait référence à la vie de ses parents et Un roi à New York renvoie à son expulsion des États-Unis. Sa relation difficile avec sa mère souffrant de troubles mentaux est souvent reflétée dans les personnages féminins de ses films et par le désir de Charlot de les sauver. La structure de ses films, sont une série de sketchs reliés par une même trame plutôt que comme une suite ordonnée par un scénario précis. Visuellement, ils sont simples et économiques, avec des scènes jouées comme au théâtre. Chaplin explique que la simplicité est préférable, que les effets pompeux ralentissent l’action, sont ennuyeux et désagréables. Que la caméra ne doit pas faire irruption.

 

 

 

 

Comme jouer du violon ou du piano,

Penser exige une pratique quotidienne.

 

 

 

 

 

Sa Musique…

 

Chaplin développe dès l’enfance une passion pour la musique et apprend seul à jouer du piano, du violon et du violoncelle. Il considère que l’accompagnement musical fait partie intégrante du film et à partir de L’Opinion publique il consacre beaucoup de temps à ce domaine. Il compose lui-même la bande-son des Lumières de la ville et fait de même pour tous ses films suivants. A partir de la fin des années 1950 et jusqu’à sa mort, il sonorise tous ses anciens courts-métrages silencieux. Comme il n’a reçu aucune éducation musicale, Chaplin ne sait pas lire ou écrire des partitions. Il fait appel à des compositeurs professionnels comme David Raksin, Raymond Rasch et Eric James pour mettre en forme ses idées. Au début de ce travail, qui peut durer des mois, Chaplin décrit exactement ce qu’il veut aux compositeurs et joue les éléments improvisés au piano. Ces mélodies sont ensuite développées en étroite collaboration. Les consignes musicales étaient les siennes, et pas une note n’était placée sans son accord. Les compositions de Chaplin donnèrent lieu à trois chansons populaires. Smile composée pour Les Temps modernes. Pour Les Feux de la rampe, Chaplin compose Terry’s Theme, qui fut popularisée par Jimmy Young sous le titre Eternally en 1952. Enfin, la chanson This Is My Song, chantée par Petula Clark pour La Comtesse de Hong-Kong atteint la première place du palmarès britannique en 1967. Le seul Oscar que Chaplin remporta fut celui de la meilleure musique de film à l’occasion de la réédition des Feux de la rampe en 1973.

 

 

 

 

INFLUENCES…

Chaplin est le plus grand artiste que le cinéma ait créé, son interprète le plus extraordinaire et son icône la plus universelle. Charlot présentent les expressions comiques de l’esprit humain les plus éloquentes et les plus riches de l’histoire du cinéma. Chaplin est considéré comme un pionnier et l’une des figures les plus influentes du début du XXe siècle. Il a changé l’imagerie, la sociologie et la grammaire du cinéma…Le premier à populariser les longs-métrages comiques et à ralentir le rythme de l’action pour y ajouter de la finesse et du pathos. Chaplin pose les pratiques de base de la réalisation cinématographique.

 

 

 

 

Federico Fellini définit Charlie Chaplin…

 

Comme une sorte d’Adam duquel Nous sommes Tous issus.