La télévision présente une image de remplacement…
La réalité leur parvient à travers l’écran, et cette réalité-là devient parfois plus réelle que leur propre vie…
David Cronenberg
55 ans de carrière et 23 longs métrages pour montrer une multitude de corps mutants qui métaphorise une sorte de fantasme universel de transgression des normes sociales. Une nouvelle forme d’humanité, libérée des carcans de la société. Son travail est moins un cinéma corporel qu’un cinéma spirituel, qui utilise le corps pour mieux explorer la complexité de l’esprit humain. Tour à tour expérimental, gore, fantastique et dramatique, l’œuvre de Cronenberg est un corps protéiforme. A l’image des êtres qui la peuplent, elle est ouverte à toutes les métamorphoses. Sa filmographie peut se caractériser par trois principaux axes…
Le Corps humain sous un aspect angoissant et monstrueux…








Son cinéma, influencé par la psychanalyse, sonde les addictions et les phobies de la société occidentale ainsi que les névroses, laissant libre cours au déchaînement de pulsions refoulées. Ses deux thèmes récurrents sont la double personnalité et le massacre du corps humain. Ses films, caractérisés par une grande maîtrise technique et un univers à la fois malsain, ultra-violent et cérébral, ouvrent la voie à de nombreuses lectures sur le conditionnement, le mal, l’aliénation et la confusion entre réel et virtuel.
Les rapports de l’humain avec la technologie sous un aspect visionnaire…






Le père de la Nouvelle Chair œuvre dans un Fantastique psychanalytique, organique et souvent visionnaire. Entre froideur et humour, ses œuvres s’apprécient grâce à leur force hors du commun et à leur portée philosophique et les films de David Cronenberg deviennent rapidement cultes. Créateur de génie, parfois dépassé par son désir d’esthétisme malsain, ce canadien surdoué a délivré une filmographie quasi parfaite. Tout l’intérêt de l’œuvre de Cronenberg réside dans son inscription polymorphe, à la fois au sein d’un cinéma d’auteur acclamé par la critique et d’un cinéma de genre à la croisée du body horror, du thriller psychologique et de la science-fiction. De ce fait, nul étonnement à ce que l’impact social de la technologie tienne une place prépondérante dans la filmographie du réalisateur. Au fil de ses films, le canadien plaide pour une reconsidération de notre approche du progrès scientifique. Il y dresse une critique acerbe de la vision positiviste de l’industrialisation…Crash renvoie le spectateur au culte libidinal du consommateur envers l’objet technique. Le mythe du scientifique salvateur est également déconstruit…Dans La Mouche, Jeff Goldblum incarne un scientifique que la perte de contrôle de son invention mènera à la déchéance.
La dégénérescence du corps social sous un aspect réaliste et pessimiste…






David Cronenberg n’est pas un cinéaste accessible. Sa propension à prendre son temps et à refuser le rythme effréné de l’horreur mainstream refroidit les adeptes du cinéma gore de bas étage. A l’inverse, la violence apparente de son propos tiendra éloignés les amateurs de drames d’auteurs traditionnels. Pourtant, malgré la dialectique entre cinéma de genre et dimension intellectualisant exacerbée, l’œuvre de ce génie du septième art questionne intensément notre corps, notre esprit, nos rapports à la technologie, à la violence, à la sexualité…Elle mérite d’être découverte, étudiée, aimée, mais également viscéralement rejetée. Il est difficile d’aimer Cronenberg dès la première rencontre car il nous tourmente, nous éprouve et avant tout, il bouscule nos préconceptions et nos a priori sur l’humain, la technique et la réalité.

55 ans de carrière / 23 longs métrages…
Il y a un vrai côté hybride dans son cinéma car il mélange tous les genres, avec des changements de tonalités parfois assez abruptes, ce qui fait que le côté hybride des thèmes explorés l’est également par la forme même de ses films. Il y a une réflexion métacinématographique, la forme et le fond font corps…Refus d’incarnation du monde, donc on est toujours dans des espaces qui paraissent déjà morts, à l’image des personnages et ça revient dans sa filmographie. Il est très pessimiste sur l’évolution du monde moderne. Il refuse complètement l’illusion réaliste.