Le Voleur de bicyclette a été, après Rome ville ouverte (1945) de Roberto Rossellini, une pièce fondatrice de ce qu’il est convenu de nommer le néoréalisme italien. Longtemps considéré comme l’un des plus beaux films de tous les temps, il s’agit pourtant bien d’un chef-d’œuvre qui supporte le verdict des années. Le scénario est, en apparence, d’une simplicité absolue…Antonio, un père de famille, est au chômage de longue durée lorsqu’il se voit proposer un emploi de colleur d’affiches, à condition d’être en possession d’une bicyclette. Il récupère alors celle qu’il avait mise en gage mais dès le premier jour de son embauche il se la fait voler. Accompagné de son jeune fils Bruno, il décide dès le lendemain de tout mettre en œuvre pour retrouver la trace du voleur et de la bicyclette. Le récit a été écrit par plusieurs scénaristes qui ont adapté un roman peu connu de Luigi Martolini. Le film a marqué le cinéma par la démarche de son réalisateur, Vittorio De Sica, vedette populaire des années 30, et qui avait déjà signé l’excellent Sciuscia (1946), de la même veine. Le cinéaste s’est impliqué dans la conception du Voleur de bicyclette en y greffant son style…Décor et tournage en extérieurs, recours à des acteurs non professionnels, filmage de lieux fréquentés par les pauvres, dans une vision semi-documentaire novatrice à l’époque.
L’Italie de l’après-guerre révèle ici ses déshérités, et la quête d’Antonio le fera traverser les quartiers les plus meurtris de la banlieue de Rome avec ses logements sociaux vétustes, ruelles malfamées, petits marchés plus ou moins licites voient ici se croiser des mendiants achetés par des dames patronnesses et leurs plat de pâtes en échange d’une participation à la messe, des petits délinquants tentés par le vol impulsif, des voyantes peu lucides ou d’honnêtes citoyens tentant de joindre les deux bouts en gardant leur dignité. Antonio est de ceux-là, mais ce « père courage » n’hésitera pas à braver l’interdit pour assurer un niveau de vie correct aux siens. D’aucuns ont reproché à De Sica une tendance au misérabilisme, comparativement à l’ascèse d’un Rossellini. Pourtant, il n’en est rien, tant le réalisateur montre à merveille les ambivalences de l’âme humaine et préfère la dénonciation sociale implicite au pamphlet ostensible. Et nul sentimentalisme dans les passages emblématiques de la relation entre le père et le fils. Simplement la volonté de ne pas rejeter l’approche émotionnelle et d’atteindre aussi le public populaire. Ainsi en est-il de la partition musicale d’Alessandro Cicognini, qui est loin de jouer sur l’emphase et de trahir le ton néoréaliste, et contribue à faire du Voleur de bicyclette un film aussi touchant que les mélodrames de Chaplin. L’œuvre obtint un succès public et un triomphe critique, avant de remporter plusieurs prix internationaux dont l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. De Sica réalisera par la suite des films de la même mouvance, dont Umberto D. (1952), avant de s’orienter vers un cinéma plus classique, tout en poursuivant une carrière d’acteur.
Malgré le succès planétaire de Sciuscia en 1946, il ne trouve pas de producteur…Un jour, Selznick m’a proposé des millions. Mais il posait une condition que Cary Grant interprétât le rôle de l’ouvrier. J’ai refusé malgré tous ces dollars dont j’avais besoin. Ce sont finalement trois amis qui l’aident. Pour des raisons économiques, De Sica cherche des acteurs non-professionnels. Il découvre Lamberto Maggiorani (le père) dans une usine de Breda où il était tourneur, et Enzo Staiola (le fils) dans un camp de personnes déplacées à côté de Rome. Tous deux sont choisis, paraît-il, pour leur façon de marcher. Le Voleur de bicyclette est davantage un film sur la solitude et la détresse du chômeur que sur le chômage lui-même. Chaque séquence documentaire les grands ensembles, le mont-de-piété, la messe des pauvres, la diseuse de bonne aventure, la cellule du Parti, le marché aux puces, les logements misérables participe à la mise en place active du drame. Le personnage principal entre en résonance avec toute cette humanité, qu’elle soit indifférente ou hostile. Le film sort en Italie, puis circule dans les festivals internationaux, où il obtient de nombreux prix. Mais en Italie, une presse indignée, niant sa valeur artistique, appelle au boycott et le dénonce comme véhiculant la propagande communiste. Pourtant, Le Voleur de bicyclette est apolitique à travers l’errance d’un laissé-pour-compte, c’est un portrait juste et précis de l’Italie d’après-guerre. Et celui de toute l’humanité saisie par la détresse.
Admirablement construit sur une durée qui court du vendredi au dimanche et qui intègre une précise description de la ville, la triste aventure de Ricci, l’ouvrier à qui on vole sa bicyclette et qui, privé de son outil de travail, finit par tenter à son tour de dérober un objet vital, vaut autant par l’expression d’un désespoir individuel que par la revendication collective du droit au travail.
Le Voleur de bicyclette est l’œuvre la mieux connue du néoréalisme italien, initié par Roberto Rossellini en 1945 avec Rome, ville ouverte pour donner au cinéma un style beaucoup plus réaliste. De Sica vient de réaliser le très controversé Sciuscià et il est incapable d’obtenir le soutien financier de studios importants pour son film. Aussi il finance son projet lui-même et avec l’aide d’amis. Son projet est de montrer le chômage et la pauvreté de l’Italie de l’après-guerre. Pour cela, il choisit un roman de Luigi Bartolini comme base générale pour son scénario qu’il co-écrit avec Cesare Zavattini et d’autres. Suivant les principes du néoréalisme, De Sica tourne seulement en décors extérieurs naturels dans les rues de Rome, aucune scène en studio et avec des acteurs non professionnels. De Sica cherche à recréer un parallèle entre leurs vies réelles et leurs vies à l’écran toujours dans l’optique de plus de réalisme. De Sica auditionne Maggiorani alors que ce dernier amène son jeune garçon pour auditionner. Plus tard, il auditionne Enzo Staiola, âgé de huit ans, qu’il remarque en train d’aider son père à vendre des fleurs, lors de ses repérages dans les rues de Rome. La scène finale dans laquelle Antonio et Bruno s’éloignent de la caméra en marchant main dans la main est un hommage à de nombreux films de Charlie Chaplin qui est un des réalisateurs préférés de De Sica. Parallèlement, il prend des contacts à Hollywood, avec le producteur David Selznick qui, s’étant déclaré intéressé, veut imposer Cary Grant dans le rôle d’Antonio Ricci. Le réalisateur trouve finalement les moyens nécessaires en Italie et tourne dans les rues de Rome avec des acteurs non professionnels.
À sa sortie en Italie, il suscite une polémique, les communistes lui reprochant de n’être qu’une peinture de la vie des classes les plus pauvres sans apporter de propositions, et d’autres lui reprochant son misérabilisme. Le film connaît un grand succès international. Woody Allen le considère comme le plus beau film de l’histoire du cinéma. Oscar du meilleur film étranger 1949.
SERGIO LEONE FIGURANT EN PRETRE…