2024 – Futur Apocalyptique

Observer rétrospectivement comment un film a été promu avant sa sortie en salles est souvent passionnant et c’est le cas de Civil War. Dès sa première affiche avec ses snipers dissimulés sous la flamme de la statue de la Liberté new-yorkaise, le film d’Alex Garland se présentait en pur film de guerre au pays de l’Oncle Sam, faisant resurgir les lointains souvenirs de la guerre de Sécession. Les bandes-annonces suivantes se sont, elles, justement appuyées sur le conflit armé entre le gouvernement et l’alliance inattendue Californie-Texas pour teaser une Amérique profondément divisée, a priori au coeur du récit. Enfin, ce sont les grosses scènes de batailles dans les rues de Washington DC concluant les différents trailers qui ont promis un spectacle pyrotechnique impressionnant. Et c’est sans parler de l’affiche finale à la Apocalypse Now où New York est cerné par des hélicoptères et autres porte-avions, entérinant la guerre civile brutale qui devrait se jouer sous les yeux des spectateurs. Ce film de guerre, il est bel et bien dans Civil War, on ne peut pas le nier.

 

 

 

 

VOYAGE AU BOUT DE LA GUERRE…

par Alexandre Janowiak

 

Le quatrième film d’Alex Garland propose des scènes d’action et tension à la fois anxiogènes et volcaniques. Qu’il s’agisse d’un attentat dans les rues new-yorkaises, d’une pause torturée à une station essence de fortune, d’un violent affrontement au coeur d’un bâtiment en ruine ou d’une embuscade au milieu de nulle part, Civil War offre un spectacle explosif. Avec une mise en scène viscérale, le Britannique nous plonge même au coeur d’une bataille complètement folle à Washington DC, où les rues sont envahies de blindés et la Maison-Blanche prise d’assaut. Malgré un budget aussi restreint de 50 millions de dollars, rarement aura-t-on vu une scène de guerre aussi réaliste et immersive dans les rues de la capitale américaine mêlant avancée au sol et vue aérienne avec une fluidité déconcertante. Autant dire que les spectateurs venus découvrir une Amérique à feu et à sang en auront pour leur argent rien qu’avec ce climax. Toutefois, ce thriller d’action tant vendu par la promotion n’est pas vraiment ce qui intéresse Alex Garland, pas plus que les raisons de la guerre en cours. Pourquoi l’Amérique a implosé ? Comment la Californie progressiste et le Texas conservateur ont pu s’allier malgré leur division politique ? On n’en saura jamais vraiment plus. Le film nous apprendra juste discrètement que le président a démantelé le FBI, bombardé des civils et est en poste pour un 3e mandat anti-constitutionnel, ce qui semble trois des nombreuses raisons ayant conduit le pays à s’enflammer. Alex Garland aurait pu établir une guerre entre « gentils » et « méchants », progressistes et conservateurs, démocrates et républicains, protectionnistes et libéraux…mais il décide de faire de cette lutte armée une toile de fond plus abstraite. Ainsi, plus le film avance, plus il est difficile d’identifier ou matérialiser les différents camps et d’entendre les tenants et aboutissants du conflit. Bien sûr, en restant assez flou, le film divisera vu les profondes divergences de l’Amérique contemporaine et tant il semble (parfois) nécessaire de rappeler frontalement les dérives tragiques de la récente administration Trump. Pourtant, ce choix scénaristique et politique en soi est extrêmement pertinent.

 

Avec ce brouillard délibéré, Civil War déstabilise en permanence les spectateurs, les oblige à se questionner sur leur boussole morale et à voir plus loin que leurs préjugés. Il rend ainsi plus tangibles les réflexions du groupe de reporters au coeur du récit et en route pour Washington DC afin d’interviewer le président. Alors que leur road trip de New York jusqu’à la Maison-Blanche est semé d’embûches dans un paysage post-apocalyptique plus vrai que nature, les situations auxquelles ils sont confrontés sont plus angoissantes et il est impossible de se rassurer sur leurs possibles sorts. C’est toute la force de la terrible séquence où les journalistes rencontrent le personnage de Jesse Plemons leur demandant….Quel genre d’Américains êtes-vous ?. Alex Garland joue habilement avec l’identité de ce soldat et reste mystérieux sur le clan qu’il soutient. La parano envahit l’écran, les reporters ne savent plus à qui ils ont affaire et les spectateurs suivent abasourdi, impuissant, cette altercation. La simple question suffit à déceler l’acuité de Civil War, pointant du doigt l’horreur de la guerre où quiconque peut devenir un ennemi, même par erreur, et nous plongeant dans un monde terrifiant, car dépourvu de repère.

 

C’est avant tout ce sujet qui semble motiver Alex Garland, la quête de sens dans un monde qui n’en a plus. Ce n’est pas anodin si Civil War est surtout un road movie sur des journalistes tentant de capturer au mieux la réalité qui les entoure, de relater ce qui les entoure, qui, quoi, comment et pourquoi. Avec son quatrième film, Alex Garland s’intéresse aux rôles des médias, à leur intégrité, à leur pouvoir, à l’importance de l’information et de la recherche de la vérité. Dans cette droite lignée, le film est assez limpide avec l’évolution de Lee (Kirsten Dunst), clin d’oeil évident à la célèbre photographe de guerre Lee Miller et jusqu’au prénom. Au début du film, Lee photographie le président sur sa télévision, mais son objectif sera bel et bien de traverser l’écran, de devenir une protagoniste de l’histoire et de photographier en chair et en os ledit président pour immortaliser la réalité (et non celle qu’une propagande veut vendre aux spectateurs-électeurs-citoyens). Cette ambition demande toutefois du courage et que se passerait-il si plus personne n’avait envie de défier les balles, les explosions avec pour seule arme son appareil photo ou son crayon ? En posant un regard aussi solide sur l’effondrement à la fois politique, philosophique et éthique de l’Amérique, Civil War rend évidemment hommage à tous les reporters de guerre qui ont risqué, risquent et risqueront leur vie pour raconter l’Histoire. Ce n’est pas franchement subtil ni même très original, mais il en ressort un besoin urgent de transmettre ce savoir-faire, cette volonté d’informer, cette soif de vérité. La passation progressive entre Lee et Jessie, l’aspirante photographe incarnée par l’excellente Cailee Spaeny, est d’ailleurs particulièrement touchante malgré une énorme bévue scénaristique en toute fin de métrage. Cela dit, Garland questionne aussi ce travail de reporter et notamment cette difficulté à capter les événements sans les transformer, les saisir sans les biaiser, afin de ne pas contaminer une information dans un sens ou dans l’autre. D’où toute l’ambiguïté se jouant devant nos yeux et l’horreur psychologique torturant les esprits des journalistes…Ils observent, retranscrivent, photographient, racontent…Pour nous interpeller et espérer qu’on réagisse, mais ils n’interviennent jamais. Ils subissent ce qu’ils expérimentent, mais vivent aussi de cette adrénaline, exulte presque d’être aux premières loges de la déliquescence d’une nation.

 

D’une certaine manière, l’information est une forme d’art où l’artiste ne doit jamais se mettre plus en valeur que sa peinture et où sa peinture ne doit jamais surpasser le message qu’elle veut diffuser. C’est là qu’Alex Garland frappe d’autant plus fort saisissant parfaitement le pouvoir de l’image en jouant lui-même de ce paradoxe. Son film repose sur un grand spectacle flamboyant, une photographie léchée, un sound-design envoûtant, une bande-originale fascinante…Ce qui pourrait sembler inapproprié ou opportuniste vu le sujet Sauf qu’il n’en oublie jamais de donner une vraie valeur à ses images pour proposer un point de vue plus nuancé, une perspective plus sagace car affranchie d’un partisianisme devenu tristement contre-productif au fil du temps. C’est ce qui donne à Civil War sa pertinence politique, sociale et existentielle. Une denrée précieuse, voire rarissime, à cette échelle hollywoodienne actuellement et dont le cinéaste semble bien avoir conscience. Alors qu’il a révélé que son film serait probablement son dernier film en tant que réalisateur, on peut presque supposer qu’Alex Garland souhaite incarner à son tour un messager ici. Un lanceur d’alerte craignant que cette forme de cinéma disparaisse, ce qui n’annoncerait rien de bon pour l’avenir du 7e art. Espérons qu’il soit entendu.

 

 

 

 

 

 

 

APRES L’ATTAQUE DU CAPITOLE…

par Allan Blanvillain

 

 

Il y a des films dont les images restent gravées longtemps après, comme si leur but était de hanter un spectateur témoin de ce qu’il ne voulait pas voir. Civil War, porté par Kirsten Dunst, est de ceux-là. De l’aveu d’Adam McKay, lorsqu’il préparait le scénario de son Don’t Look Up il a dû le réécrire plusieurs fois pour forcer le trait de sa satire tant la réalité entre l’élection de Trump et l’épidémie mondiale de COVID rattrapait sans cesse l’absurdité initiale de sa fiction. Difficile de ne pas penser à ces propos lorsqu’on pose notre regard sur Civil War portrait fictif d’une Amérique en proie à une nouvelle guerre civile dans un futur proche. En prenant le parti de suivre cette destruction des États-Unis tels que nous les connaissons par le biais d’une équipe de journalistes traversant un bout du territoire, le réalisateur et scénariste nous renvoie volontairement aux images de l’attaque du Capitole américain aux premières heures de l’année 2021 par les partisans d’un Président attisant les braises. D’une allocution initiale d’un chef de l’État coupable de prime abord avant que l’on n’en apprenne davantage d’un déni manifeste de la réalité, le cinéaste nous renvoie à ces chefs d’État autour du globe fautifs du même tort. Le premier pas dans Civil War est tremblant, car le film n’a d’inventé que la situation présentée, pas les causes et encore moins son portrait des conséquences. Contrairement à Don’t Look Up, on ne peut pas se réfugier derrière l’humour. En tant que metteur en scène, Alex Garland a autant de défenseurs que de détracteurs. Néanmoins, on ne peut nier qu’au sein d’Ex Machina, Annihilation, la série Devs ou Men se dévoilent de vrais gros morceaux de cinéma capables de nous emporter sur un plan de film. Civil War ne fera pas exception et il suffit d’une explosion kamikaze pour nous faire entendre l’ampleur du drame qui va se dérouler devant nous. C’est surtout un film de peu de mots, où Garland, épousant le principe d’Hitchcock qui déclarait que…Tout ce qui est dit et non montré est perdu pour le spectateur, place l’image au centre de son récit. Une pièce maîtresse de sa dramaturgie à la fois dans ce qu’il met lui-même en scène et par ses deux figures féminines principales, photographes de guerre. Le long-métrage n’a pas vocation à nous expliquer la situation géopolitique, c’est une capture d’un moment de pure folie où des hommes s’entre-tuent par conviction, par rage, par survie ou par pulsion.

 

 

L’appareil photo se transforme alors en symbole. Là où la caméra est devenue une arme de propagande aux mains de chaque belligérant, l’appareil photo est une captation objective de la réalité. Il grave l’image des victimes de guerre, de ceux qui la font, de toute l’absurdité et de la morbidité de ce nouveau monde, sans distinction de camp. Un point de vue que le film embrasse en évitant d’exploiter les allégeances. Qu’on soit catapultés au sein d’une escarmouche ou d’un groupe armé isolé, on ne peut que deviner qui se bat sous quel drapeau, sans aucune certitude avant le champ de bataille final, nécessairement plus explicite. Une volonté de nous laisser dans le flou pour nous surligner l’évidence, dans une guerre civile, il n’y a pas de gentils ou de méchants, l’essentiel est juste d’être celui encore en vie à la fin. Quand deux snipers se croisent, le pourquoi devient stupide, seul reste le « comment être celui qui fera le bon tir ? ». Ce refus de s’attarder sur le contexte général peut créer une forme de frustration, Civil War étant en perpétuel décalage entre ce que nous aurions pensé voir et ce qu’il veut qu’on voit. Alex Garland est le seul maître à penser de son histoire et n’a pas la bonté de vouloir lâcher la moindre concession afin de nous dresser un portrait plus élargi de la situation. À l’image de ses personnages, le métrage suit sa route, s’arrête pour porter un regard sur des cas isolés, mais ne se lancera jamais dans une vision aérienne de son sujet. Civil War est une interview inversée où il nous donne ses réponses en nous abandonnant avec nos autres questions. Et pourtant, tel le journaliste Hunter S. Thompson nous racontant le derby du Kentucky sans écrire une ligne ou presque sur les chevaux, Alex Garland a parfaitement retranscrit les détails d’une guerre civile sans s’embourber à l’expliquer. Un portrait brut et brutal d’une Amérique en plein chaos au travers des images nihilistes prises par celles et ceux qui refusent de prendre parti, mais dont la réalité en fait des acteurs à part entière. C’est là l’autre tour de force de Civil War, celui de rester coller aux visages des personnes qui ont le leur collé à l’appareil alors que la mort devient une routine comme une autre. Personnages qui ont délaissé la morale et la solidarité dans leur quête du bon cliché, de l’exclusivité. Comme si, pour parvenir à capturer l’âme des participants au conflit, il fallait avoir abandonné la sienne. La perte d’humanité se joue ainsi à chaque niveau et le film met en scène ce point de bascule lorsque la photographe de guerre émérite, jouée par Kirsten Dunst, rencontre la novice Cailee Spaeny (qui brillait en début d’année dans Priscilla). La première est un exemple de froideur forgé par des années de conflits aux quatre coins du monde et qui n’a pas davantage de sensibilité pour celui touchant aujourd’hui son entourage. La seconde cherche la gloire sans avoir conscience de ce que signifie côtoyer la mort.

 

À ce titre, Alex Garland a fait des choix de casting judicieux, tant Kirsten Dunst est désormais une figure installée à Hollywood qui voit Cailee Spaeny, dont la carrière s’annonce tout aussi prometteuse que son aînée, marcher sur ses traces. Une sorte de passage de relais qui peut également se voir comme un avertissement cynique envers une industrie qui n’hésitera jamais à sacrifier ses gloires vieillissantes au profit d’une jeunesse qui a faim. Deux femmes, bien accompagnées par Wagner Moura et Stephen McKinley Henderson, dont la guerre va tester les limites. Jusqu’où peut-on regarder des cadavres en face avant de se perdre ? Jusqu’où peut-on regarder des cadavres en face avant de se retrouver ? Civil War propose un récit humain glaçant où une photo peut dire la vérité et un cri nous ramener à la réalité. 109 minutes qui en paraissent le double lorsqu’on les passe en apnée, le souffle coupé par une tension de chaque instant. Le meilleur film de Garland et l’une des œuvres majeures de l’année, assurément.

 

 

 

 

 

 

LA CHUTE DE LA MAISON BLANCHE…

 

L’effondrement de l’Amérique. Cette thématique retournée, labourée, rabâchée depuis si longtemps par tout un tas de films et de cinéastes spectateurs de la déliquescence d’une Nation qui n’est plus aussi « great » que ne le voudrait Donald Trump. Cet effondrement, certains l’ont traité frontalement, d’autres plus subtilement voire métaphoriquement. Certains ont filmé la destruction au premier degré, d’autres le désenchantement des valeurs, des rêves ou d’un modèle. Certains l’ont fait par le drame, d’autres par l’action, le thriller, l’horreur ou la comédie. Du récent Le Monde Après Nous au cinéma des Coppola, Ferrara, Scorsese, De Palma, Oliver Stone en passant par celui des Romero ou Jordan Peele, la société américaine qui collapse est un sujet de longue date qui peut être approché de mille et une manière et pour dire mille et une choses. Mais avec toujours dans le viseur, cette idée d’une Nation qui dévisse, perdant de son unité, de son âme, de sa force. 2024, Alex Garland s’en empare à son tour avec une nouvelle vision, forte, puissante et surtout pertinente, captant le climat de chaos actuel pour en tirer une fable d’anticipation intense, passionnante et terrifiante.

 

 

Il s’est écoulé des années politiquement difficiles qui ont créé une fracture dans l’Union, il y a eu un Président incontrôlable, il y a eu un symbole bafoué avec l’attaque du Capitole, et il y a toujours une Nation plus que jamais divisée avec des camps qui se haïssent. Et si cette réalité tangible continuait de croître dans la folie et les extrêmes au lieu de prendre fin ? « Oui mais bon, de là en arriver à une Guerre Civile… » diront certains. Soit. Mais il y a cinq ans, personne n’imaginait que le Capitole serait un jour attaqué par une horde de supporters d’un Président fou, rejetant les règles de la Constitution pour venir « prendre le pouvoir ». Alex Garland s’est nourri de tout cette actualité brûlante pour nous pondre…la bombe de l’année !

 

 

 

 

Civil War est un film quasi parfait, à la fois thriller d’une intensité rare et brûlot politique gonflé à bloc, dressant le portrait fascinant d’un futur proche où toute une civilisation s’écroule dans la violence qu’elle a contenu pendant trop longtemps, jusqu’à ce que la marmite implose en emportant tout sur le passage de son onde de choc. Un sacré miroir tendu à l’Amérique d’aujourd’hui confrontée à des divisions et fractures idéologiques profondes avec une haine accrue comme dénominateur commun à ces camps inconciliables. Et Civil War de décrypter à la perfection ce que pourraient être les enjeux d’une guerre civile moderne sur le sol américain. L’allégorie sur la réelle proximité du point de bascule est assez évidente et assez flippante aussi. L’extrême intelligence d’Alex Garland est d’avoir fait de ses protagonistes principaux, des reporters de guerre. Ils ne sont là ni pour agir ni pour juger, seulement pour photographier et filmer afin que d’autres commentent ensuite. Ils n’ont pas de point de vue, ils ne sont engagés dans rien, ils sont de simples témoins pour l’Histoire. Rien que cette idée follement maligne permet au cinéaste de s’extraire de tout positionnement politique pour faire la simple démonstration d’une escalade horrifiante. Horrifiante, car ce qui choque le plus dans Civil War, c’est l’absolue crédibilité de ce qu’il raconte. Pour la faire courte, dans une Amérique trumpiste, tout ce que montre le film pourrait arriver très très vite. L’impact du film en est décuplé, Civil War est effroyablement glaçant. D’autant que Garland ne nous épargne rien dans un raisonnement très construit et fruit d’une fine analyse post-politique. La guérilla dans les grandes villes, les dérives dans les états rednecks profonds, la puissance d’armées divisées dans un pays aussi immense, la dangerosité de l’engagement dans une Nation où tout un chacun est armé…

 

Le fond pourrait nourrir des débats à n’en plus finir tant Alex Garland fait preuve d’une intelligence implacable dans sa démonstration. En espérant qu’il ne soit pas pris de travers par un public terre-à-terre capable d’y voir la crédibilisation d’un possible acte de soulèvement. Mais ce n’est pas que ça, il n’est surtout jamais une thèse d’anticipation politique pompeuse. Garland a opté pour le thriller choc et son sens du spectacle immersif ne sera pas laissé sur le bas-côté. Au programme, il va y avoir du thriller frissonnant, des scènes extraordinaires, des moments d’action sidérantes et des images marquantes qui foutent du coton dans les jambes. La virtuosité d’une mise en scène à se prosterner devant tant de beauté et d’esthétisme artistique, l’intelligence de chaque plan et la clairvoyance de l’écriture, le montage au cordeau, l’élaboration de scènes relevant du pur génie, la tension et le suspense qui règnent en maître dans un film capable de surprendre, de choquer, d’émouvoir aux larmes ou de couper le souffle, tout cela se met en ordre de marche et au diapason pour s’activer au service d’un thriller hyper-haletant et par moments ultra-spectaculaire, marqué par une noirceur nihiliste qui prend aux tripes et à la gorge. Ultra-spectaculaire disait-on…Civil War a coûté 50 millions de dollars soit que dalle dans le système de production hollywoodien actuel. Pour un si petit budget sans doute équivalent au budget parking d’Universal pour y garer l’égo de Vin Diesel, Alex Garland nous gratifie de séquences visuellement ahurissantes de force de frappe, voire parmi les séquences d’action à haute intensité les plus incroyables que l’on ait vu depuis des lustres avec les pitreries cascadées de l’ami Tom Cruise. Le seul regret dans un film alors conjugué au presque-parfait, une scène finale brillante dans ce qu’elle dit de ses personnages mais un brin convenue et téléphonée dans l’exécution. On a frôlé le 5 étoiles. Quand le thriller-spectacle captivant rencontre la fable politique puissante, cela nous donne un film immense, un film qui hante longtemps, un film porté par des comédiens exceptionnels et un cinéaste qui maîtrise autant son propos que l’attention de spectateurs absorbés et dans l’impossibilité de descendre d’un TGV lancé à toute vitesse. A la croisé du film post-apocalyptique, du thriller de guerre, du film d’action et du portrait glaçant de l’Amérique actuelle divisée, chaotique, violente et gangrenée par sa culture de l’extrême démesure,

 

Civil War est un film ÉNORME !