11-Retour sur images…

Toutes les nuits je regarde un Monde à la dérive…Et le matin nous repartons rouler dans un monde presque irréel qui nous demande juste de ne pas déranger…Après un barrage dans combien de temps encore avant une première bombe…et après…Sans réponse, ni solution…Attendre mais quoi et comment…

 

 

 

 

Ce matin le ciel est sous une couche de nuages d’altitude qui donne un aspect grisâtre aux photos…Résultat peu d’images et surtout ne pas trop traîner sur les routes…Les orages approchent…Alors rouler fort avant d’atteindre Lorient après 35Kms sur des pistes et des routes parfois trop fréquentées.

 

 

 

 

Chaque matin avec les courses de la veille, Chris prépare le « casse croûte » du midi. A Pont Aven avant de vous parler du film culte à son nom, il y a aussi ses galettes. Dernière pause avant d’affronter les orages et une pluie inconnue depuis deux semaines la bienvenue pour une Bretagne assoiffée et asséchée.

 

 

 

Lorient et ses lignes de transport par bateau bus et traverser un bras de mer à 1,50€ vélo compris.

 

 

 

Les galettes de Pont Aven

 

L’HISTOIRE…Henri Serin, VRP en parapluies, a pris l’habitude, pour échapper à l’ennui de son quotidien conjugal, de fréquenter quelques maîtresses au gré de ses déplacements professionnels…Lors d’un déplacement en Bretagne, à proximité de Pont-Aven, sa voiture heurte un sanglier…Il fait alors la connaissance d’Émile et surtout d’Angela, jeune québécoise peu farouche dont Henri s’éprend…

 

 

 

 

Il n’est pas si simple de placer Joël Séria le réalisateur dans l’histoire du cinéma français de la deuxième moitié du vingtième siècle, à tel point que pour une grande partie des exégètes, il ne semble même pas nécessaire de chercher à le faire et la faiblesse des ressources biographiques ou analytiques à son sujet est assez éloquente du dédain dont le cinéaste fait encore aujourd’hui institutionnellement l’objet, quand bien même une très brève rétrospective à la Cinémathèque de Paris lui aura été consacrée au début de l’été 2018. Pour autant, certains de ses films Les Galettes de Pont-Aven en premier lieu ont passé l’épreuve du temps, avec des images ou des répliques entrées dans l’imaginaire collectif, et un panel de laudateurs qui se réclament en partie de son héritage comme Gustave Kervern et Benoît Delepine, amateurs revendiqués de longue date, et qui lui confieront un petit rôle en forme d’hommage en 2018 dans I Feel good. Les Galettes de Pont-Aven est particulièrement prodigue en aphorismes paillards, depuis le « T’es moche mais je vais te fourrer ! » adressé à une danseuse nue par l’ordure haute en couleurs incarnée par Bernard Fresson jusqu’au « Tu sens la pisse, toi, pas l’eau bénite », forme insolite de compliment adressé par Monsieur Henri à son amante pour la comparer positivement à sa femme trop bigote…Sans oublier ce mémorable « Oh nom de Dieu d’bordel de merde » qu’il est difficile de lire sans entendre la voix de Jean-Pierre Marielle.

 

 

 

 

Les Galettes de Pont-Aven est aussi souvent présenté comme une comédie, et l’assez solide ancrage de sa réputation « culte » repose sur ce malentendu. Il y a dans le film d’assez régulières raisons de sourire, ce n’est pas le problème, mais le film raconte surtout l’histoire d’un homme en crise, qui fuit l’aliénation de sa cellule familiale pour aller d’échecs en échecs et s’effondre dans une déchéance alcoolique. Le film s’achève sur une note optimiste, sur l’idée vivifiante d’une « renaissance » sous forme de bandaison, mais qui a bien regardé le film remarque nécessairement un écho entre la jovialité de Monsieur Henri lors des dernières séquences et la joie profonde qui l’habitait, quelques dizaines de minutes plus tôt, lors de sa fuite avec Angela, c’est-à-dire avant qu’il ne sombre. Ce que le film décrit, c’est donc un dépressif en sursis, qui demeure toujours à la lisière de rebasculer. Le film montre surtout la manière dont cet homme en crise a construit son existence sur la projection qu’il opère sur les femmes, indépendamment de ce qu’elles sont réellement…Il les fantasme, les commente abondamment, les place dans une forme de « sur-réalité » idéalisée qui ne fait qu’alimenter son mal-être profond. Notons d’ailleurs que de canadiennes en bretonnes, de jeunes en vieilles, de filles probes en filles de joie, d’ingénues en perverses le film offre un panel suffisamment large de profils pour qu’on puisse difficilement l’accuser d’établir une quelconque « taxonomie de la féminité », si ce n’est à travers une aspiration à la liberté, à l’affranchissement, qui mérite d’être soulignée. Rappelons que Monsieur Henri se rêve en peintre, c’est-à-dire dans le rôle non pas de celui qui éprouve la réalité mais de celui qui la figure, la représente conformément à son regard. Son épopée pontaveniste fait ainsi écho à celle d’autres peintres ayant écumé la cité bretonne, en premier lieu desquels Paul Gauguin, dont il est bien mentionné dans le film que lui aussi avait une forme d’obsession pour la gente féminine…Monsieur Henri est ainsi un obsédé, mais il faut impérativement, en l’occurrence, débarrasser le terme de sa connotation morale pour l’envisager de façon précise, il court, de façon illusoire, derrière une obsession, qui est celle de toucher à la perfection esthétique telle qu’il la perçoit dans le corps féminin « Je vais peindre tes yeux, ta bouche, ton front, ton corps, tes cuisses, ton cul…Ah oui, ton cul surtout ! ». En ce sens, il y a un cousinage positif à établir, dans l’absurdité de sa tragicomédie, avec certaines figures du cinéma italien de la même époque, par exemple le Capitaine Consolo, incarné par Vittorio Gassman dans Parfum de femme de Dino Risi.

 

Les Galettes de Pont-Aven marque l’apogée de la figuration du bonhomme franchouillard tel que Jean-Pierre Marielle le sublimera dans la deuxième moitié des années 70, de Calmos à Un moment d’égarement, de Dupont Lajoie à On aura tout vu. Avec sa voix chaude et sa faconde inimitable, son torse poilu et son œil malicieux, il compose un personnage à la tendresse rustaude plus nuancée qu’il n’y paraît, dissimulant une fragilité presque enfantine derrière son arrogance virile de façade. Sa force, indiscutablement, est de parvenir à maintenir le personnage au premier degré, dans sa grossièreté comme dans sa sincérité, sans y ajouter une once de commentaire ironique…Si la scène du duo sur Kenavo fonctionne si bien, c’est que la drôlerie folklorique et l’émotion pure y cohabitent de façon équilibrée, sans que l’une ne prenne le dessus de l’autre. Il dépasse l’archétype scénaristique du beauf de province pour lui conférer les heures de gloire vacillantes de quelque chose qui tiendrait d’un glorieux et vain crépuscule.  

 

 

 

 

 

 

 

Jean Pierre Marielle c’est 60 ans de carrière, 150 films et un seul unique prix d’honneur Lumière…En 1976 déjà nommé pour son rôle dans les Galettes de Pont Aven mais aussi pour celui dans Coup de torchon de Bertrand Tavernier en 1981 et surtout totalement oublié ! en 1992 pour le rôle de sa vie en Monsieur Sainte Colombe dans Tout les matins du Monde d’Alain Corneau En 1976 Michel Galabru jouait le rôle de sa vie dans le Juge et l’assassin de Bertrand Tavernier mais lui ne sera pas oublié…

 

 

 

A Suivre…